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L’optimisation fiscale via des contrats de licence, n’est pas toujours de la fraude fiscale

Publié le par - 233 vues

La Cour de justice vient de rendre un arrêt qui fera grand bruit dans le monde des sites de commerce électronqiue, et des contenus adultes en particulier. Elle juge que le transfert du savoir-faire permettant l’exploitation du site érotique livejasmin.com de la Hongrie à Madère où un taux de TVA moins élevé s’applique ne constitue pas, en lui seul, une pratique abusive. En revanche, ce transfert constitue une pratique abusive si son objectif est de dissimuler le fait que le site est en réalité exploité depuis la Hongrie.

Les faits

WebMindLicenses (WML) est une société hongroise détenue par l’homme d’affaires hongrois György Gattyán. En 2009, WML a, par un contrat de licence, donné en location à la société Lalib établie à Madère (Portugal) un savoir-faire permettant l’exploitation du site Internet « livejasmin.com ». Ce site fournit des services audiovisuels interactifs à caractère érotique qui font intervenir en temps réel des personnes physiques se trouvant dans le monde entier.

À la suite d’un contrôle fiscal auprès de WML, l’autorité fiscale hongroise a considéré que le transfert du savoir-faire de WML à Lalib ne correspondait pas à une opération économique réelle et que ce savoir-faire était, en réalité, exploité par WML depuis le territoire hongrois.

Dans ces conditions, cette autorité fiscale a notamment estimé que la TVA se rattachant à cette exploitation aurait dû être payée en Hongrie et non au Portugal, et a donc imposé à WML le paiement de diverses sommes, dont 10 293 457 000 forints hongrois (HUF) (environ 33 145 618 EUR) au titre de la TVA, 7 940 528 000 HUF (environ 25 568 574 EUR) à titre d’amende et 2 985 262 000 HUF (environ 9 612 602 EUR) au titre des pénalités de retard.

WML a formé un recours contre la décision de l’autorité fiscale devant le Fővárosi Közigazgatási és Munkaügyi Bíróság (tribunal administratif et du travail de Budapest, Hongrie). Ce dernier demande à la Cour de justice quelles circonstances il convient de prendre en compte pour apprécier si la construction contractuelle utilisée aux fins du transfert de la Hongrie vers le Portugal du savoir-faire permettant l’exploitation du site concerné constitue une pratique abusive. Il cherche également à savoir si la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne permet aux autorités fiscales des États membres de recueillir et d’utiliser des preuves obtenues par des moyens secrets dans le cadre d’une procédure pénale.

L’optimisation fiscale via les contrats de licence

Dans son arrêt rendu ce jour, la Cour répond en premier lieu que, afin de constater que le contrat de licence en cause procède d’une pratique abusive dont l’objectif est de bénéficier d’un taux de TVA moins élevé à Madère, la juridiction hongroise doit établir que ce contrat constitue un montage purement artificiel visant à dissimuler le fait que les services concernés sont en réalité fournis par WML depuis la Hongrie.

Afin de vérifier quel était le lieu réel de la fourniture de ces services, des éléments objectifs tels que l’existence physique de Labib en termes de locaux, de personnel et d’équipements doivent être pris en considération.

En revanche, le fait que le gérant et unique actionnaire de WML était le créateur du savoir-faire en cause et qu’il exerçait une influence ou un contrôle sur son développement et son exploitation n’apparaissent pas décisifs en eux-mêmes. De même, la circonstance que la gestion des transactions financières, du personnel et des moyens techniques nécessaires à la fourniture de ces services était assurée par des sous-traitants ainsi que les motifs qui peuvent avoir conduit WML à donner en location son savoir-faire au lieu de l’exploiter elle-même ne permettent pas, à eux seuls, de constater l’existence d’un montage purement artificiel.

En tout état de cause, le simple fait qu’un contrat de licence a été conclu avec une société établie dans un État membre qui applique un taux normal de TVA moins élevé que celui de l’État membre dans lequel la société donneuse de licence est établie ne peut pas être considéré, en l’absence d’autres éléments, comme une pratique abusive.

La preuve de l’abus fiscal

En second lieu, la Cour relève que le droit de l’Union ne s’oppose pas à ce que l’administration fiscale puisse utiliser des preuves obtenues dans le cadre d’une procédure pénale parallèle non encore clôturée, pour autant que les droits fondamentaux garantis par ce droit et notamment par la Charte soient respectés.

À cet égard, la Cour souligne que les interceptions de télécommunications ainsi que les saisies de courriels électroniques, effectuées à l’encontre de WML, constituent des ingérences dans l’exercice du droit au respect de la vie privée et familiale, si bien qu’elles doivent être prévues par la loi et mises en œuvre dans le respect du principe de proportionnalité.

Il appartiendra à la juridiction nationale de vérifier si, en l’occurrence, ces exigences ont été satisfaites et si l’utilisation par l’autorité fiscale des preuves obtenues par ces moyens était également autorisée par la loi et s’est avérée nécessaire. Il lui incombera également de s’assurer si WML a eu la possibilité, dans le cadre de la procédure administrative, d’avoir accès à ces preuves et d’être entendue sur celles-ci.

Si la juridiction nationale constate que WML n’a pas eu cette possibilité ou que les preuves en question ont été obtenues en violation de la Charte ou bien si cette juridiction n’est pas habilitée à exercer ce contrôle, elle doit écarter ces preuves et annuler la décision attaquée, dans la mesure où celle-ci se trouverait, de ce fait, sans fondement.

(affaire C-419/14)

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