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La loi HADOPI entre en vigueur après la censure partielle du Conseil Constitutionnel

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L’accès de l’Hadopi au pouvoir de sanction est suspendu par les gardiens de la Constitution. La réponse graduée subsiste mais elle est désormais bicéphale. Les nombreuses autres mesures prévues par la loi sont entrées en vigueur. Un projet de loi Hadopi 2 a été présenté en Conseil des Ministres le 24 juin.

Certains l’avaient annoncé depuis longtemps, la loi Hadopi n’est pas passée indemne entre les fourches caudines du Conseil Constitutionnel.

Saisis par soixante députés, comme le permet l’article 61 de la Constitution française, les gardiens de la conformité de la loi à la norme suprême ont – au terme d’un raisonnement critiquable à certains aspects – censuré une petite partie du dispositif préparé par le Ministère de la Culture, suite aux accords de l’Elysée de novembre 2007, pour lutter contre la piraterie des œuvres et des objets de droit protégés sur internet, la dernière étape de la riposte graduée (1).

Le « presque nouveau » pouvoir du juge d’ordonner toute mesure qu’il jugera utile en présence d’une atteinte au droit d’auteur et aux droits voisins causée par le contenu d’un service de communication au public en ligne est par ailleurs confirmé (2).

Encore faut-il s’entendre sur la véritable portée et les conséquences de cette censure et de la décision, au-delà du discours partisan et partant caricatural que l’on peut lire dans les médias : la riposte graduée existe toujours (3).

La loi du 12 juin 2009 a été promulguée au JO du 13 juin et un projet de loi est en préparation pour régir les nouveaux rapports entre la Commission de protection des droits de l’Hadopi et le juge judiciaire (4).

1) La censure partielle de la riposte graduée

Parmi les nombreuses dispositions dont était saisi le Conseil Constitutionnel, les articles 5 et 11 du projet sont déclarés contraires à la Constitution et à l’ensemble des règles qui figurent au premier rang de la hiérarchie des normes – ce que l’on nomme le bloc de constitutionnalité – tandis que l’article 10 n’échappe à la censure qu’au bénéfice de réserves d’interprétation.

Tout d’abord, « la base légale » du dispositif est validée par le Conseil, et il n’est pas inintéressant de l’évoquer rapidement, car l’opposition ultra médiatique des thèses en présence mène immanquablement à la caricature.

a) L’obligation de surveillance de l’accès internet est validée

L’obligation de surveillance du titulaire de l’accès internet, la « base légale » de la loi est jugée distincte du délit de contrefaçon, et suffisamment claire et précise, contrairement à ce qu’avançaient les députés auteurs de la saisine.

C’est L. 336-3 nouveau du code de la propriété intellectuelle : " La personne titulaire de l’accès à des services de communication au public en ligne a l’obligation de veiller à ce que cet accès ne fasse pas l’objet d’une utilisation à des fins de reproduction, de représentation, de mise à disposition ou de communication au public d’oeuvres ou d’objets protégés par un droit d’auteur ou par un droit voisin sans l’autorisation des titulaires des droits prévus aux livres Ier et II lorsqu’elle est requise "

Encore faut-il préciser que cette obligation était déjà énoncée à l’article L 335-12 dans le code de la propriété intellectuelle depuis la DADVSI, sans être toutefois assorti de sanction.

b) Le recours à une autorité administrative indépendante n’est pas justifié ni proportionné en l’espèce car la liberté d’expression et de communication est en cause face à la Propriété littéraire et artistique

Les auteurs de la saisine estimaient que le caractère fondamental du droit à la liberté d’expression et de communication imposait l’intervention du juge, et que les sanctions étaient par ailleurs manifestement disproportionnées.

Le Conseil Constitutionnel a d’abord rappelé qu’il s’agit en l’occurrence de mettre en balance deux droits ou libertés fondamentales concurrents :

D’une part la liberté de communication, dont une composante est bien la liberté d’accéder aux services de communication au public en ligne, affirme le Conseil Constitutionnel, validant ainsi au moins en partie la thèse défendue à Bruxelles par le célèbre amendement 138 et ses rédacteurs euro-députés, selon laquelle le droit à internet est un droit fondamental,

D’autre part le droit de propriété, qui par nature évolutif, engloberait désormais naturellement les prérogatives des titulaires de droit d’auteur et de droits voisins (la question fait l’objet depuis toujours d’un intense débat doctrinal !), et justifierait la lutte contre la contrefaçon sur internet.

Deux libertés fondamentales équivalentes a priori, donc, qu’il s’agit de concilier de manière harmonieuse.

Par ailleurs, le principe de la séparation des pouvoirs – législatif et règlementaire –, et l’article 34 de la Constitution qui définit les domaines respectifs de ce qui relève de la loi et du règlement n’interdisent pas que la loi, dans le but de concilier les libertés en présence, confie à une autorité administrative indépendante le pouvoir de prononcer une sanction, dès lors toutefois qu’elle protège en même temps le principe de la légalité des délits et des peines, – « principes applicables à toute sanction ayant le caractère d’une punition » – les droits de la défense et les droits et libertés constitutionnellement garantis .

Deux décisions successives intéressant le CSA et la COB ont en effet officiellement reconnu la possibilité pour ces autorités de disposer d’un pouvoir de sanction (Cons. const., 17 janv. 1989, déc. n° 88-248 DC et 28 juill. 1989, déc. n° 89-260 DC).

On comprend que, dès lors que des garanties suffisantes sont apportées, le pouvoir de sanction de l’Hadopi serait validé.

Ayant posé les bases de son raisonnement, le Conseil Constitutionnel poursuit, et semble revenir immédiatement sur ce qu’il vient juste d’énoncer, c’est-à-dire que les deux libertés en présence sont équivalentes à ses yeux :

« toutefois, la liberté d’expression et de communication est d’autant plus précieuse que son exercice est une condition de la démocratie et l’une des garanties du respect des autres droits et libertés ; que les atteintes portées à l’exercice de cette liberté doivent être nécessaires, adaptées et proportionnées à l’objectif poursuivi.

Considérant que les pouvoirs de sanction institués par les dispositions critiquées habilitent la commission de protection des droits, qui n’est pas une juridiction, à restreindre ou à empêcher l’accès à internet de titulaires d’abonnement ainsi que des personnes qu’ils en font bénéficier ; que la compétence reconnue à cette autorité administrative n’est pas limitée à une catégorie particulière de personnes mais s’étend à la totalité de la population ; que ses pouvoirs peuvent conduire à restreindre l’exercice, par toute personne, de son droit de s’exprimer et de communiquer librement, notamment depuis son domicile ; que, dans ces conditions, eu égard à la nature de la liberté garantie par l’article 11 de la Déclaration de 1789, le législateur ne pouvait, quelles que soient les garanties encadrant le prononcé des sanctions, confier de tels pouvoirs à une autorité administrative dans le but de protéger les droits des titulaires du droit d’auteur et de droits voisins » (considérants 15 et 16 de la décision).

La liberté de communication serait-elle plus importante que la nécessité de respecter les droits du créateur et de l’artiste pour le Conseil Constitutionnel ?

Le Conseil Constitutionnel semble retirer d’une main ce qu’il vient d’accorder de l’autre.

En effet, il estime qu’il était disproportionné, non pas de porter atteinte dans certains cas précis à la liberté de communication pour protéger le droit d’auteur et les droits voisins, ce qu’il reconnaît comme possible, mais de confier ce rôle à une autorité administrative indépendante.

Pour le Conseil Constitutionnel, désigner une autorité administrative – même composée de hauts magistrats – et la doter d’un pouvoir de sanction aussi large, constitue en soi une atteinte à la liberté de communication et d’expression, quelles que soient les garanties apportées.

Il ne juge même pas nécessaire d’examiner le maillon suivant du raisonnement : la coupure de l’accès est-elle une atteinte disproportionnée à la liberté de communication compte tenu de la composition de la commission de protection des droits et des garanties apportées par le projet ?

Le raisonnement n’est pas sans rappeler l’argumentation développée par le Conseil Constitutionnel lorsqu’il avait censuré, sur le fondement du même article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, la première fois que la question de la dévolution par la loi d’un pouvoir de sanction à une autorité administrative lui a été posée – s’agissant de la liberté de la presse – la dévolution d’un tel pouvoir à la Commission pour la transparence et le pluralisme de la presse, car « cette répression ne saurait être confiée à une autorité administrative » (Cons. const., 10- 11 oct. 1984, déc. n° 84-181 DC).

Ensuite, sa jurisprudence avait évolué de la manière suivante : d’abord par un revirement implicite, lorsque deux ans plus tard la CNCL fut dotée à l’égard des services privés de l’audiovisuel d’une panoplie répressive que le Conseil constitutionnel s’abstint de remettre en cause, évitant de soulever d’office le moyen tiré de l’inconstitutionnalité d’un tel dispositif (Cons. const., 18 sept. 1986, déc. n° 86-127 DC) ; position qu’il réitéra quelque temps après s’agissant du Conseil de la concurrence (Cons. const., 23 janv. 1987, déc. n° 86-224 DC). Ensuite il reconnaîtra explicitement la possibilité de confier un tel pouvoir à la COB et au CSA dans les deux décisions précitées (COB et CSA).

Le raisonnement rappelle également le raisonnement des rédacteurs de l’amendement 138.

Dès lors que la liberté de communication est en cause, seul le juge judiciaire est compétent pour le Conseil Constitutionnel, surtout si le pouvoir de sanction conféré est très large.

Et le Conseil de rappeler que la commission de protection des droits « n’est pas une juridiction ».

On rappellera seulement à cet égard que depuis l’arrêt Didier, le Conseil d’Etat, tout en reconnaissant que les Autorités administratives indépendantes ne sont pas des juridictions, entoure le pouvoir de sanction conféré qui leur est confié par le législateur des garanties du procès équitable offertes par l’article 6 de la CEDH, dès lors l’autorité peut être regardée comme décidant « de contestations sur des droits et obligations de caractère civil, ou du bien fondé de toute accusation en matière pénale » (Conseil d’Etat, Ass., 3 décembre 1999, « Didier », jurisdata n° 1999-0521201).

Par ailleurs, dans une ordonnance du 19 février 2008, le même Conseil d’Etat a qualifié la CNIL de « Tribunal » au sens de l’article 6-1 de la CEDH, eu égard « à sa nature, à sa composition et à ses attributions ».

Certains ont interprété cette ordonnance, au demeurant « seulement » de référé, comme un infléchissement de sa jurisprudence vers une reconnaissance du statut de juridiction à certaines autorités administratives indépendantes (https://www.droit-technologie.org/actuality-1141/pouvoir-de-santion-la-cnil-doit-agir-en-juridiction.html).

Toujours est-il que l’article 5 de la loi hadopi est jugé non-conforme à la Constitution. Seul le juge judiciaire (gardien de la liberté individuelle au sens de l’article 66 de la Constitution, rédigé toutefois en contemplation de la seule liberté d’aller et venir) doit intervenir.

Les joies de l’a contrario nous font en revanche présumer que si la liberté atteinte en cause avait été autre, ou la sanction plus ciblée, la solution eut peut être été différente.

On comprend qu’en creux, le principe de la coupure d’accès à l’internet est justifié dans certains cas, et qu’il est donc validé par le Conseil Constitutionnel à condition d’être prononcé par un juge.

c) Le renversement de la charge de la preuve instauré par le projet de loi équivaut à une présomption de culpabilité contraire à l’article 9 de la Déclaration des droits de l’homme

Des présomptions de culpabilité peuvent exister nous rappellent les gardiens de la norme suprême, notamment en matière contraventionnelle, si elles sont réfragables, c’est-à-dire supportent la preuve contraire, que les faits induisent raisonnablement la vraisemblance de l’imputabilité et que les droits de la défense sont respectés.

On connaît l’exemple des contraventions au code de la route, un radar sur l’autoroute par exemple.

Le Conseil estime ensuite le renversement de la charge de la preuve opéré par le projet Hadopi contraire aux exigences précitées, celle de l’article 9 de la Déclaration des droits de l’homme sur la présomption d’innocence.

On comprend qu’à ses yeux, la présomption est irréfragable, et que les droits de la défense sont insuffisamment respectés, car c’est au titulaire de la ligne de démontrer qu’il avait tout fait pour éviter l’acte de contrefaçon.

En creux, car le Conseil ne rentre pas dans les détails du débat, on présume que l’aspect très technique du fondement de la présomption de culpabilité (adresse IP, fiabilité des dispositifs protégeant la connexion, wifi, etc.) a joué dans sa décision.

L’article 11 de la loi est jugé inconstitutionnel.

d) Les traitements de données personnelles constitués par les ayants droits ne sont pas contraires au droit à la vie privée à une réserve

La lutte contre les pratiques de contrefaçon sur internet est justifiée par « l’objectif de sauvegarde de la propriété intellectuelle et de la création culturelle », qui se voit tout de même reconnaître une portée constitutionnelle. 

Dès lors, le Conseil valide le projet à cet égard, à condition que les traitements de données personnelles que constituent la collecte des données par des personnes privées soit autorisés par la CNIL, et qu’ils ne soient utilisés que pour aller devant le juge – à défaut, il porteraient atteinte de manière disproportionnée au droit fondamental à la vie privée ;

On retrouve également ici le raisonnement mené par le Conseil en ce qui concerne la liberté de communication : l’intervention de l’autorité administrative, même indépendante, est considérée en soi comme une atteinte à la vie privée, quelles que soient les garanties dont cette intervention est entourée.

Pourquoi cela dit le droit fondamental à la vie privée serait-il atteint d’une manière différente si l’interlocuteur est un collège de hauts magistrats spécialisés au sein de la Commission de protection des droits, avec recours devant le juge judiciaire, plutôt que le juge judiciaire, moins spécialisé, et déjà plus qu’occupé ?

Les traitements pourront être transmis à la commission de protection des droits (qui conserve le rôle de saisine du juge), ou directement au juge.

A la condition de l’autorisation de la CNIL, la possibilité de tels traitements de données par des agents assermentés, y compris ceux de l’Hadopi par l’intermédiaire de ses propres agents assermentés, est validée, dès lors que seul le juge judiciaire y aura ensuite accès.

2) La validation de l’article 10 de la loi Hadopi sur les pouvoirs du juge face à une atteinte aux droits de propriété littéraire et artistique

Les députés auteurs de la saisine soulignaient que l’article 10 de la loi

" En présence d’une atteinte à un droit d’auteur ou à un droit voisin occasionnée par le contenu d’un service de communication au public en ligne, le tribunal de grande instance, statuant le cas échéant en la forme des référés, peut ordonner à la demande des titulaires de droits sur les œuvres et objets protégés, de leurs ayants droit, des sociétés de perception et de répartition des droits visées à l’article L. 321-1 ou des organismes de défense professionnelle visés à l’article L. 331-1, toutes mesures propres à prévenir ou à faire cesser une telle atteinte à un droit d’auteur ou un droit voisin, à l’encontre de toute personne susceptible de contribuer à y remédier "

constituait une atteinte disproportionnée à la liberté de communication, en ce qu’elle pouvait priver beaucoup d’internautes du droit de recevoir des informations et des idées.

En outre, ils alléguaient que le caractère général de la disposition pourrait inciter les FAI à restreindre à titre préventif l’accès à l’internet : c’est la question du filtrage, qui suscite craintes et fantasme sécuritaire, qu’ils soient justifiés ou non, ou encore les obligations des FAI, et des éditeurs au regard des contenus, question très délicate, que nous ne faisons ici qu’effleurer.

Le Conseil valide la disposition, en l’assortissant d’une réserve : il appartiendra seulement au juge judiciaire de respecter la proportionnalité lorsqu’il décidera de prononcer une injonction, ou d’ordonner une mesure de nature à faire cesser l’atteinte.

Il est dommage que le Conseil ne se soit pas prononcé sur la compatibilité entre l’article 10 de la loi Hadopi et les dispositions de la LCEN, transposées de la directive commerce électronique, dont l’article 15 prohibe en principe toute obligation de surveillance généralisée à la charge des FAI, et qui constituait l’une des critiques adressées par la Commission européenne au projet (https://www.droit-technologie.org/actuality-1183/l-avis-circonstancie-de-la-commission-europeenne-sur-le-projet-de-loi.html).

3) Portée et conséquences : la riposte graduée subsiste et tout le reste de la loi est promulgué dans une apparente indifférence

a) La réponse graduée subsiste, mais éclatée

On l’aura compris, c’est le pouvoir de sanction de la Commission de protection des droits qui est censuré par le Conseil Constitutionnel.

En ce qui concerne la réponse graduée, elle n’est pas condamnée en elle-même, mais la responsabilité, éclatée, en reviendra à deux autorités distinctes : l’ensemble du dispositif prévu à l’origine s’appliquera, jusqu’à la procédure menant à la sanction, qui sera transmise et prononcée par le juge judiciaire.

Saisie de constats d’infraction transmis par les agents assermentés de ses ayants droits, ou par les siens propres, la Commission de protection des droits enverra des recommandations, et il reviendra au juge judiciaire de prononcer la sanction de la suspension, sur la base de l’obligation de surveillance du titulaire de l’accès, qui elle est clairement validée.

Quel sera le fondement légal de la suspension d’accès ordonnée par le juge ? L’article L336-3 édictant l’obligation de surveillance est pour l’instant dépourvu de sanction.

L’article L336-2 nouveau du CPI, de par sa formulation très large, serait à la limite susceptible de jouer ce rôle, mais on sait qu’il n’a pas été écrit pour cela.

Le gouvernement a annoncé la venue d’un texte spécial, qui aura en outre pour fonction d’organiser précisément la transmission des « dossiers » au juge judiciaire, et qui serait présenté avant la fin de la session parlementaire en cours.

Un projet de loi "relatif à la protection pénale de la propriété littéraire et artistique sur internet" a été présenté en Conseil des Ministres le 24 juin 2009.

b) Les autres dispositions de la loi

Quant au reste du contenu de la loi Hadopi, il est validé soit directement par le Conseil – c’est par exemple la labellisation par l’Hadopi des services de communication au public en ligne respectant le droit de la propriété intellectuelle – soit en raison du fait qu’il n’a pas fait l’objet de la saisine : ce contenu est important.

4) La loi du 12 juin 2009 a été promulguée et un nouveau texte est en préparation

La loi du 12 juin 2009 comprend d’abord la partie relative à la réponse graduée post Conseil Constitutionnel.

Mais également des parties moins médiatisées, mais non moins essentielles et lourdes de conséquences :

L’ensemble des missions du collège de l’Hadopi, notamment d’observation de l’offre légale, et plus généralement tout ce qui touche au volet « positif » d’encouragement de l’offre légale des accords Olivennes qui ont constitué la genèse de la loi : ainsi de la partie, très technique, modifiant la chronologie des médias, principalement en réduisant les délais DVD et VOD.

Une autre partie capitale de la loi est la création d’un véritable statut juridique de la presse en ligne, et la réforme en profondeur du droit d’auteur des journalistes, qui sont passés quasiment inaperçus dans la presse non spécialisée, et qui mériterait une analyse approfondie quant à ses conséquences, que nous ne réaliserons pas ici.

En conclusion :

S’il faut se féliciter que le respect des droits fondamentaux reste la priorité en France – il se confirme en outre que la liberté d’expression et de communication bénéficie d’un rang et d’une valeur privilégiés aux yeux du Conseil Constitutionnel – le principal objectif (annoncé en tout cas) de la loi Hadopi, l’objectif pédagogique, celui de sensibiliser les pirates massifs non commerciaux et les internautes de manière générale au respect des droits de propriété littéraire et artistique, pourrait être mis à mal par deux effets pervers, qui viendront encore assombrir l’horizon de la création, que l’on soit au demeurant de droite ou de gauche, pour ou contre l’Hadopi.

D’abord, que cette « masse » des internautes pirates non commerciaux et ceux qui ne piratent pas, les principaux visés par le projet initial, ne prennent trop au pied de la lettre les hourras de victoire diffusés en ligne et n’en viennent à penser trop facilement qu’ils peuvent continuer comme avant, ou commencer, en toute impunité, à « pirater ».

Ensuite, que le juge judiciaire, gardien constitutionnel de la seule liberté d’aller et venir, et gardien naturel des autres libertés individuelles, ne puisse assumer la charge – certes noble – que l’on lui rajoute ainsi sur le dos, ou dans le même ordre d’idées, que la procédure soit rapidement compliquée et rendue difficile par des avocats complices, à tort ou à raison du reste.

Il pourrait paradoxalement en résulter un renouveau de l’intérêt de certains ayants droits pour la procédure pénale en contrefaçon, qui subsiste et que le projet cherchait à réserver aux cas graves : la piraterie à titre onéreuxen bande organisée.

Surtout alors que le juge se préparait à accueillir dans les meilleures conditions les modifications de son jeune pouvoir d’injonction à l’encontre des FAI.

S’il en allait ainsi, les artistes et créateurs, en bout de chaîne, y perdraient plus que ce qu’ils sont venus chercher, ou de ce qu’on est venus chercher pour eux, et il serait encore plus difficile désormais de faire changer les mentalités, car il s’agit d’un nouveau précédent.

L’intitulé du projet de loi présenté le 24 juin 2009 par Madame Alliot Marie (relatif à la protection pénale de la propriété littéraire et artistique sur internet) suscite à ces égards la réflexion.

Il restera à déterminer si l’application des mesures d’encouragement de l’offre légale au sein de l’industrie culturelle est de nature à bousculer ce pessimisme.

Droit & Technologies

Annexes

Décision du Conseil Constitutionnel du 10 juin 2009

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