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Commerce électronique : les frais de renvoi et remplacement sont à charge du vendeur

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Le vendeur d’un bien doit prendre en charge les frais de renvoi et de remplacement si le consommateur se plaint d’un vice de conformité du bien vendu, C’est un coup dur pour le commerce électronique où, bien souvent, la valeur du bien et la distance font des frais de retour un élément essentiel de l’opération.

On sait que la directive sur le commerce électronique règle de façon relativement efficace la question des frais de renvoi d’un appareil acheté lorsque l’acheteur exerce son droit de rétractation. Cela est relativement bien encadré.

Les deux arrêts rendus par la cour de justice de l’Union européenne s’intéressent à l’autre aspect des choses, moins souvent traité : qu’en est-il, dans les contrats de consommation, des frais de retour et remplacement lorsque le bien acheté convient à l’acheteur mais est défectueux ?

Le cas est extrêmement fréquent dans le commerce électronique et peut représenter un enjeu important pour les sites vendeurs. Vu la distance qui sépare souvent l’acheteur du vendeur, et vu la multiplicité des intervenants dans la chaine de distribution, les frais de renvoi et remplacement peuvent très vite aboutir à des sommes importantes qui remettent en cause l’intérêt même de la vente.

Les affaires en cause

M. Wittmer et Gebr. Weber ont conclu un contrat de vente portant sur du carrelage poli. Après avoir fait poser les deux tiers environ de ce carrelage dans sa maison, M. Wittmer a constaté la présence, sur ce carrelage, de marques sombres, discernables à l’œil nu. Il souhaite que le vendeur soit condamné à lui livrer un nouveau carrelage mais aussi à prendre en charge les coûts à l’enlèvement de ce qui a déjà été posé. (affaire C-65/09)

Mme Putz et Medianess Electronics ont conclu, par Internet, un contrat de vente portant sur un lave-vaisselle neuf auquel s’ajoutent des frais de livraison. Les parties se sont accordées sur le fait que ce bien serait livré devant la porte d’entrée du domicile de Mme Putz. La livraison du lave-vaisselle et le payement du prix ont eu lieu comme convenu.  Après que Mme Putz a fait installer le lave-vaisselle à son domicile, il s’est avéré, sans que les opérations d’installation de cet appareil puissent en être la cause, que ce dernier était défectueux et que sa réparation était impossible. Les parties se sont donc accordées sur le remplacement dudit lave-vaisselle. Mme Putz a exigé que Medianess Electronics livre non seulement un nouveau lave-vaisselle, mais qu’elle procède également à l’enlèvement de l’appareil défectueux et qu’elle installe l’appareil de remplacement ou qu’elle supporte les frais d’enlèvement et de nouvelle installation, ce que cette société a refusé.

Sur l’obligation, pour le vendeur, de prendre en charge l’enlèvement du bien non conforme et l’installation du bien de remplacement

Le texte en cause est l’article 3, paragraphes 2 et 3, troisième alinéa, de la directive 1999/44/CE du Parlement européen et du Conseil, du 25 mai 1999, sur certains aspects de la vente et des garanties des biens de consommation.

La cour commence par rappeler que  selon l’article 3, paragraphe 1, de la directive, le vendeur répond, vis-à-vis du consommateur, de tout défaut de conformité existant lors de la délivrance du bien.

Elle rappelle aussi la gratuité de la mise en conformité du bien par le vendeur est un élément essentiel de la protection assurée au consommateur. Or, dit-elle, force est de constater que, si le consommateur, en cas de remplacement d’un bien non conforme, ne pouvait demander au vendeur de prendre en charge l’enlèvement de celui-ci du lieu dans lequel il avait été installé conformément à sa nature et à l’usage recherché, et l’installation du bien de remplacement dans le même lieu, ce remplacement lui occasionnerait des charges financières supplémentaires qu’il n’aurait pas eu à supporter si le vendeur avait correctement exécuté le contrat de vente. En effet, si celui-ci avait d’emblée livré un bien conforme audit contrat, le consommateur n’aurait supporté qu’une seule fois les frais d’installation et n’aurait pas dû supporter les frais d’enlèvement du bien défectueux.

Certes, les frais d’enlèvement du bien non conforme et d’installation du bien de remplacement ne figurent pas parmi ceux énumérés explicitement à l’article 3, paragraphe 4, de la directive, mais c’est l’économie générale du texte qui prime. Or, pour la cour, il est constant que la réparation d’un bien non conforme s’effectue, en règle générale, sur ce bien dans la situation dans laquelle il se trouvait au moment de l’apparition du défaut, de sorte que le consommateur ne supporte pas, dans ce cas, des frais d’enlèvement et de nouvelle installation.

Au-delà de l’économie générale de la directive, la cour trouve aussi un argument de texte dans l’article 3, paragraphe 3, de la directive : la réparation et le remplacement d’un bien non conforme doivent être effectués non seulement sans frais, mais également dans un délai raisonnable et sans inconvénient majeur pour le consommateur. Cette triple exigence est l’expression de la volonté manifeste du législateur de l’Union d’assurer au consommateur une protection effective.

Par conséquent, dans une situation dans laquelle aucune des deux parties au contrat n’a agi de manière fautive, il est justifié de mettre à la charge du vendeur les frais d’enlèvement du bien non conforme et d’installation du bien de remplacement, dès lors que ces frais supplémentaires, d’une part, auraient été évités si le vendeur avait d’emblée correctement exécuté ses obligations contractuelles et, d’autre part, sont désormais nécessaires pour procéder à la mise du bien dans un état conforme.

La cour va même plus loin et prend le soin de préciser que ce qui précède est indépendant du point de savoir si le vendeur était tenu, en vertu du contrat de vente, d’installer le bien livré. Le but est en effet de rétablir la situation qui aurait prévalu si le vendeur avait d’emblée livré un bien conforme

Sur la possibilité, pour le vendeur, de refuser la prise en charge de frais d’enlèvement du bien défectueux et d’installation du bien de remplacement disproportionnés

Il convient de rappeler que, aux termes de l’article 3, paragraphe 3, premier alinéa, de la directive, le consommateur a le droit d’exiger du vendeur la réparation du bien ou son remplacement, dans les deux cas sans frais, à moins que cela ne soit impossible ou disproportionné.

Il est précisé qu’un mode de dédommagement est considéré comme disproportionné s’il impose au vendeur des coûts qui, par rapport à l’autre mode, sont déraisonnables compte tenu de la valeur qu’aurait le bien s’il n’y avait pas défaut de conformité, de l’importance du défaut de conformité et de la question de savoir si l’autre mode de dédommagement peut être mis en œuvre sans inconvénient majeur pour le consommateur.

La question est de savoir si le caractère disproportionné est absolu ou relatif :

  • s’il est absolu, cela signifie que le vendeur peut refuser toute intervention si, de façon absolue et générale, la réparation ou le remplacement est disproportionné. La réponse du vendeur est dans ce cas « non, je n’interviens pas, car c’est disproportionné » ;
  • s’il est relatif, cela signifie que le vendeur ne peut pas refuser d’intervenir mais il conserve le droit de restreindre le choix du consommateur (réparation ou remplacement) si l’un des deux modes d’intervention est disproportionné par rapport à l’autre. La réponse du vendeur est dans ce cas « OK, j’interviens, mais seulement pour réparer car remplacer serait disproportionné » (ou l’inverse bien entendu) ;

Pour la cour, Il apparaît, par conséquent, que le législateur de l’Union a entendu donner au vendeur le droit de refuser la réparation ou le remplacement du bien défectueux uniquement en cas d’impossibilité ou de disproportion relative. En d’autres termes, dans l’hypothèse où seul l’un de ces deux modes de dédommagement s’avère possible, le vendeur ne peut donc refuser l’unique mode de dédommagement permettant de mettre le bien dans un état conforme au contrat.

Seule concession faite par la cour : si le remplacement du bien défectueux, en tant que seul mode de dédommagement possible, entraîne des coûts disproportionnés en raison de la nécessité d’enlever le bien non conforme du lieu où il a été installé et d’installer le bien de remplacement, la directive ne s’oppose pas à ce que le droit du consommateur au remboursement des frais d’enlèvement du bien défectueux et d’installation du bien de remplacement soit, si nécessaire, limité à un montant proportionné à la valeur qu’aurait le bien s’il était conforme et à l’importance du défaut de conformité.

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