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Les Etats membres connaissent-ils la Recommandation sur les paiements électroniques ?

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La Commission européenne vient de rendre accessible sur son site une étude réalisée en 2000-2001 sur la conformité de la législation des 15 Etats membres avec la recommandation européenne relative aux instruments de paiement électronique. Petit rappel La recommandation a été adoptée le 30 juillet 1997. Elle concerne la relation entre les émetteurs d’instruments de…

La Commission européenne vient de rendre accessible sur son site une étude réalisée en 2000-2001 sur la conformité de la législation des 15 Etats membres avec la recommandation européenne relative aux instruments de paiement électronique.

Petit rappel

La recommandation a été adoptée le 30 juillet 1997. Elle concerne la relation entre les émetteurs d’instruments de paiement et les titulaires de ces dits instruments (à savoir carte de débit, carte de crédit, carte accréditive, carte à débit différé, porte-monnaie électronique, application de banque à domicile, par téléphone ou par internet).

Procédant de la volonté affichée de protéger le consommateur, partie faible face aux puissants du monde bancaire, le texte opère un partage des responsabilités en cas de perte, vol de l’instrument ou utilisation frauduleuse de l’instrument. Ce partage s’avère bien entendu avantageux pour le consommateur. Tout s’articule autour de la notification de la perte, du vol ou de l’utilisation frauduleuse de l’instrument que le titulaire doit effectuer dès qu’il a connaissance de l’événement. Le partage des risques liés à l’utilisation frauduleuse de l’instrument s’opère comme suit : avant la notification, le titulaire n’est responsable que dans une limite de 150 euros, sauf s’il a agi avec une négligence extrême ou frauduleusement (responsabilité non plafonnée). Après la notification, s’est l’émetteur qui est responsable de la totalité des dépenses effectuées (sauf fraude du titulaire), l’idée sous-jacente étant de contraindre l’émetteur à bloquer au plus vite la carte.

Concernant les paiements effectués à distance, notamment sur internet (par exemple par communication du numéro de la carte de crédit et de sa date d’échéance), une disposition intéressante, quoique fort nébuleuse, tente de protéger les titulaires des utilisations frauduleuses : l’article 6 § 3 exonère le titulaire de toute responsabilité « si l’instrument a été utilisé sans présentation physique ou sans identification électronique de l’instrument même. La seule utilisation d’un code confidentiel ou de tout autre élément d’identification similaire n’est pas suffisante pour engager la responsabilité du titulaire ».

Notons au passage que l’on retrouve cette disposition à l’article 81 § 5 de la loi belge sur les pratiques du commerce (la transposition de la directive relative aux contrats à distance avait été l’occasion pour le législateur d’intégrer quelques dispositions de la recommandation du 30 juillet 1997). Par ailleurs, le Ministère des Affaires Economiques planche actuellement sur un avant-projet de loi visant à transposer en droit belge l’ensemble de la recommandation.

L’étude

L’étude a été menée à bien par un consortium de 10 partenaires dirigés par le CRID (Université de Namur) et l’université Queen Mary de Londres, d’avril 2000 à avril 2001.

L’objectif consistait à analyser dans quelle mesure la recommandation a contribué légalement et dans la pratique à améliorer la situation des titulaires d’instruments de paiement électronique, et plus particulièrement : (i) à analyser l’état de la transposition de la recommandation dans les 15 Etats membres, et (ii) à mettre en exergue les différences fondamentales entre les conditions générales de mise à disposition d’instruments de paiement et la pratique quotidienne des émetteurs.

Sur base d’une analyse approfondie de la législation, des codes de conduite, de la jurisprudence, des contrats, des études déjà réalisées, et d’enquêtes anonymes auprès des banques, les résultats suivants ont été obtenus :

  1. législation

    Seul le Danemark possède une loi en parfaite conformité avec la recommandation, certaines dispositions protégeant même davantage le consommateur (Payment cards Act, n°284, 6 juin 1984). Dans les autres pays, soit des lois sectorielles existent (loi sur les cartes de crédit), soit – et cela concerne la majorité des pays – la matière est régie par différents textes (pratiques du commerce, code civil, commerce électronique, clauses abusives, etc.).

  2. obligation de transparence

    La recommandation impose à l’émetteur d’informer au mieux le titulaire avant la conclusion du contrat ; et de lui fournir des information régulières une fois les opérations effectuées à l’aide de l’instrument. Sur ce point, l’étude constate les manquements suivants :

    • mauvaise lisibilité des informations (tenant tant à la taille des caractères utilisés qu’au trop plein d’informations fournies),
    • information fournie en temps inopportun (combien de titulaires de cartes ont-ils eu accès aux conditions générales régissant leur utilisation avant la conclusion du contrat ? En les demandant en agence – demande qui devrait pourtant sembler anodine – vous provoquez le branle bas de combat parmi les employés …)

    • forte variation des informations fournies suivant le type d’instrument concerné.

  3. droits et obligations des parties

    D’importants écarts concernent la répartition des droits et obligations des parties :

    • absence de dispositions relatives à la responsabilité de l’émetteur pour les transactions non exécutées ou mal exécutées,

    • non respect de l’obligation de limiter la responsabilité du titulaire après la notification,

    • non respect de l’exonération à la responsabilité du titulaire en cas d’utilisation de l’instrument sans présentation physique ou identification électronique.

  4. notification

    Les règles concernant la notification, et les conséquentes qui y sont attachées, sont inquiétantes dans bon nombre de pays :

    • certains émetteurs ne fournissent aucune explication sur la procédure de notification,

    • souvent, les possibilités d’accès aux procédures de notification sont limitées (notification possible uniquement pendant les heures d’ouverture des bureaux (!), notification par téléphone devant être confirmée par écrit),

    • rares sont les émetteurs qui fournissent un moyen de prouver une notification téléphonique (toutefois, un bon exemple : Card Stop, qui donne un numéro permettant de prouver la date et l’heure de la notification).

  5. preuve

    Bien que la recommandation prévoit que la charge de la preuve dans tout différend avec le titulaire incombe à l’émetteur, la plupart des pays placent la preuve sur le titulaire.

  6. résolution des litiges

    La recommandation invite les Etats membres à s’assurer qu’il existe des moyens adéquats et efficaces de règlement des différends entre titulaires et émetteurs. Se prononcer sur ce qu’il faut entendre par « moyen adéquat et efficace de règlement de litiges » était hors de propos pour l’étude, qui constate cependant :

    • un manque d’information dans les contrats sur l’existence de modes alternatifs de règlement des litiges,

    • un manque d’impartialité des organes existants, composés exclusivement de représentants des émetteurs.

Conclusions

Voilà un texte bien peu pris en considération par les législateurs nationaux et les émetteurs bancaires … Pourtant, la volonté affichée par la Commission en 1997 était clairement, malgré l’absence de force contraignante d’une recommandation, d’inviter les Etats membres « à prendre les mesures nécessaires afin que les émetteurs d’instrument de paiement électronique mettent leurs activités en conformité avec la recommandation ».

Que peut faire la Commission ?

Les résultats de l’étude pourraient mener à l’adoption d’une directive (cette voie était affichée dans le dernier considérant de la recommandation : « la Commission entend suivre attentivement la mise en œuvre de la recommandation, et dans le cas où elle jugerait les résultats insatisfaisants, elle proposera une législation contraignante (…) »), mais on sait que le secteur bancaire y est fortement opposé et ne manquera pas de concentrer ses efforts pour faire échec à une telle tentative.

Autre possibilité : adopter un code de conduite s’appliquant à tous les instruments. Certains codes dans le secteur bancaire connaissent un large succès, cette voie souple pourrait peut-être concentrer davantage de voix.

D’autres voies sont encore ouvertes à la Commission, et l’on peut s’attendre à ce que cette étude soit suivie d’effets, d’une manière ou d’une autre.

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