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La loi Toubon est-elle applicable aux NTIC ?

Publié le par - 7312 vues

L’article 2 de la loi du 4 août 1994, dite « loi Toubon » impose l’usage obligatoire de la langue française « dans la désignation, l’offre, la présentation, la description de l’étendue et des conditions de garantie d’un bien, d’un produit ou d’un service, ainsi que dans les factures et quittances (…) ». Les mêmes…

L’article 2 de la loi du 4 août 1994, dite « loi Toubon » impose l’usage obligatoire de la langue française « dans la désignation, l’offre, la présentation, la description de l’étendue et des conditions de garantie d’un bien, d’un produit ou d’un service, ainsi que dans les factures et quittances (…) ».

Les mêmes dispositions s’appliquent à « toute publicité écrite, parlée ou audiovisuelle ».

La loi Toubon est-elle applicable à l’internet ?

Hormis une décision du tribunal de police de Paris aux enseignements très limités, la jurisprudence est inexistante en matière d’application de la loi Toubon aux réseaux numériques tels qu’internet.
Pour la doctrine, la réponse affirmative s’impose, dans la mesure où toute publicité sur l’internet pourra être qualifiée soit d’écrite soit d’audiovisuelle.

Telle est également l’opinion exprimée par la Ministre de la Culture et de la Communication dans une réponse ministérielle de juin 1998 : « Les publicités commerciales répondant à l’obligation d’emploi de la langue française en vertu de la loi no 94-665 du 4 août 1994 le sont indépendamment du support utilisé pour assurer leur diffusion. Le second alinéa de cet article institue une obligation d’emploi de la langue française (…).

En effet, le droit communautaire comme le droit national considèrent que la ou les langues officielles du pays de commercialisation constituent, sauf rares exceptions, le moyen le plus adéquat pour assurer efficacement la protection du consommateur. Le respect de cet objectif conduit donc à ne pas traiter différemment des autres supports, au regard des obligations créées par la loi du 4 août 1994, les publicités diffusées par l’intermédiaire de l’Internet. »

La loi Toubon est-elle aux emails délivrés automatiquement en cas d’erreur ?

Dans une reponse publiée au JO du 16/03/04, le Ministre de la culture et de la communication a repondu ce qui suit au depute Jacques Godfrain :

« L’honorable parlementaire a attiré l’attention du ministre de la culture et de la communication sur l’utilisation de la langue anglaise dans les messages délivrés automatiquement, en cas d’erreur, aux internautes clients de Wanadoo. L’article 2 de la loi du 4 août 1994 relative à l’emploi de la langue française précise que l’emploi du français est obligatoire dans le mode d’emploi ou d’utilisation d’un bien, d’un produit ou d’un service.

La circulaire du 19 mars 1996 prise pour l’application de la loi indique que « les modes d’utilisation intégrés dans les logiciels d’ordinateurs comportant des affichages sur écran ou des annonces sonores sont assimilés à des modes d’emploi. En conséquence, les modes d’utilisation des logiciels d’application et des logiciels d’exploitation doivent être établis en français, qu’ils soient sur papier ou intégrés dans le logiciel ».

Ces dispositions imposant l’emploi du français trouvent à s’appliquer en l’espèce, dans la mesure où le message, délivré par voie électronique, apporte à l’internaute une information de nature à l’aider dans son utilisation du service fourni.

Le ministre de la culture et de la communication est attentif au respect
de ces mesures propres à assurer une information correcte des
utilisateurs de messageries électroniques.

Les services du ministère de
la culture et de la communication saisiront la direction générale de la
concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes au
ministère de l’économie, des finances et de l’industrie, afin qu’une
réflexion s’engage avec les fournisseurs d’accès à l’Internet et les
hébergeurs de courriers électroniques pour trouver à cette question
techniquement complexe une solution qui tienne compte des besoins des
utilisateurs et des contraintes économiques des fournisseurs d’accès.
« 

La loi Toubon est-elle applicable aux sites étrangers ?

La question la plus délicate demeure sans conteste celle de l’application de la loi Toubon aux sites web conçus en langues étrangères, tous par nature accessibles à partir du territoire français.

Toute publicité est en effet susceptible d’être reçue et lue par les Français, quel que soit son lieu d’origine, ce qui impliquerait l’usage systématique du français !

Certains auteurs prônent l’application du critère de « public cible », qui permettrait d’éviter pareil écueil : l’usage du français ne deviendrait obligatoire que lorsque la publicité a la France pour destination. L’application concrète dépend étroitement de chaque cas d’espèce, mais le critère est atteint dès que le marché français est la cible principale — ou l’une des cibles principales — de la publicité.

La même proposition a été avancée dans la réponse ministérielle précitée, et est partagée par le Conseil d’Etat.

Une autre solution est parfois évoquée : appliquer par analogie aux sites web étrangers les exceptions prévues aux articles 12 et 13 de la loi, qui disposent que l’obligation d’employer le français n’est pas applicable « aux oeuvres cinématographiques et audiovisuelles en version originale » ni « aux programmes, parties de programmes ou publicités incluses dans ces derniers qui sont conçus pour être intégralement diffusés en langue étrangère (…) ».

L’idée est certes séduisante mais sa mise en œuvre risque d’être pour le moins difficile, par exemple dans le cas d’un site web dont le contenu est présentée en plusieurs langues (pour partie en français, pour partie dans une ou plusieurs autres langues, par exemple l’anglais). Dans ce cas, le site n’est manifestement pas conçu « pour être intégralement diffusé en langue étrangère »…

En somme, à l’instar de l’avis exprimé par le Conseil d’Etat et par un député dans un rapport remis au Premier ministre en mars 1997, la seule solution sérieuse à terme semble être une modification législative.

La législation italienne sur les contrats à distance offre à cet égard un exemple intéressant : lorsque le consommateur souhaite recevoir les informations dans sa langue, il doit en informer expressément le fournisseur qui a l’obligation de se plier à ce vœu . Cette solution permet de répondre au besoin de protection du consommateur, tout en « évitant d’entraver la promptitude des trafics commerciaux ».

La loi Toubon est-elle contraire au droit européen ?

Certains auteurs critiquent la loi Toubon au motif qu’elle serait difficilement compatible avec l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme qui garantit la liberté d’expression.

En outre, le tribunal de grande instance de Paris a jugé que la loi Toubon était contraire au Traité instituant la Communauté européenne.

Cette décision semble toutefois isolée, et seule la Cour de justice des Communautés européennes pourra le cas échéant établir ou non le principe de l’illégalité de la loi Toubon au regard des principes européens de libre circulation. Une censure de la Cour n’est, selon nous, pas exclure, compte tenu de sa dernière jurisprudence, de plus en plus restrictive à l’égard des législations imposant l’utilisation d’une langue déterminée pour la commercialisation d’un produit.

Ainsi, dans un arrêt du 12 septembre 2000, la Cour de justice a considéré que « L’article 14 de la directive 79/112 concernant l’étiquetage et la présentation des denrées alimentaires destinées au consommateur final ainsi que la publicité faite à leur égard s’oppose à ce qu’une réglementation nationale impose l’utilisation d’une langue déterminée pour l’étiquetage des denrées alimentaires, sans retenir la possibilité qu’une autre langue facilement comprise par les acheteurs soit utilisée ou que l’information de l’acheteur soit assurée par d’autres mesures. Une telle obligation constituerait une mesure d’effet équivalant à une restriction quantitative des importations, interdite par l’article 30 du Traité ».

Plus d’infos ?

– L’ouvrage paru chez Litec : La protection juridique du cyber-consommateur.

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