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Projet de loi belge sur le commerce électronique : première analyse

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Le 30 novembre 2001, le Conseil des Ministres belge a adopté le projet de loi qui vise à transposer la directive du 8 juin 2000 sur le commerce électronique. La directive devait être transposée en janvier 2002. Il est à espérer que la transposition aura lieu dans le premier semestre 2002. Compte tenu de l’importance…

Le 30 novembre 2001, le Conseil des Ministres belge a adopté le projet de loi qui vise à transposer la directive du 8 juin 2000 sur le commerce électronique.

La directive devait être transposée en janvier 2002. Il est à espérer que la transposition aura lieu dans le premier semestre 2002.

Compte tenu de l’importance de ce texte pour l’avenir du commerce électronique en Belgique, nous consacrerons cette chronique à l’analyse des grandes lignes du projet de loi.

Définitions (art. 2)

Le projet débute par des définitions, dont celle du « service de la société de l’information », à savoir « tout service fourni normalement contre rémunération, à distance, par voie électronique et à la demande individuelle d’un destinataire de service ».

Par référence à un considérant de la directive, le terme « normalement » signifie que le texte vise tant le commerce électronique proprement dit, que les services fournis gratuitement aux usagers et intégralement financés par les recettes publicitaires ou issues du parrainage.

La publicité est définie par référence à l’article 22 de la loi du 14 juillet sur la protection du consommateur, à savoir « toute communication
ayant comme but direct ou indirect de promouvoir la vente de produits ou de services, » Une différence non négligeable avec la directive, qui incluait également dans la notion de publicité la promotion de l' »image » de l’entreprise.

Le projet exclut de la notion de publicité les noms de domaine et les adresses de courrier électronique, ainsi que les « communications élaborées de manière indépendante, en particulier lorsqu’elles sont fournies sans avantage économique ».

La directive préférait l’expression « sans contrepartie financière », ce qui pourrait induire des différences d’interprétation, en particulier lorsqu’un lien hypertexte est établi sans contrepartie financière directe mais dans le cadre d’un site à caractère commercial. En effet, tout contenu d’un tel site procède d’une logique de valorisation économique…

Champ d’application (art. 3)

La loi en projet s’applique aux services de la société de l’information, en précisant qu’elle complète le dispositif légal relatif à la protection de la santé publique et du consommateur (notamment la loi du 14 juillet 1991 précitée) .

Elle n’est toutefois pas applicable à certains secteurs ou certains domaines,
par exemple celui de la fiscalité ou les activités de jeux de hasard, y compris les
loteries et les transactions portant sur des paris. Ainsi, les casinos virtuels qui
fleurissent sur le web ne seront pas visés par la future loi.

Principe de non-autorisation préalable (art. 4)

Le projet stipule que l’accès à l’activité d’un prestataires de services de la société de l’information et son exercice ne sont pas soumis à des régimes d’autorisation spéciaux, qui ne s’appliqueraient pas à des services semblables fournis par d’autres moyens. Ainsi, il serait contraire au projet de soumettre l’ouverture de tout site web à une procédure d’autorisation. En revanche, un site web pourra être soumis à autorisation si l’activité en tant que telle est réglementée (par exemple les services bancaires et financiers en ligne).

Application de la législation belge au prestataire établi en Belgique (art. 5)

Les prestataires de services de la société de l’information, tels que des opérateurs de sites web, seront soumis à la législation belge s’ils sont établis sur le territoire belge.

Inversément, les prestataires établis dans un autre Etat membre ne seront pas tenus de respecter les exigences applicables en Belgique.

Le projet définit (art. 2) le lieu d’établissement du prestataire comme l’endroit où un opérateur exerce d’une manière effective une activité économique au moyen d’une installation stable pour une durée indéterminée, étant précisé que la présence et l’utilisation des moyens technologiques requis pour fournir le service ne constituent pas en tant que telles un établissement du prestataire.

Pour les sites web, cela signifie concrètement que l’emplacement du serveur sera insuffisant à caractériser une installation stable.

Il est à noter à cet égard qu’en matière de fiscalité sur Internet, l’OCDE a emprunté la voie opposée, puisqu’elle préconise d’assimiler, à certaines conditions, un serveur à un établissement stable.

Dérogations au principe de libre prestation de services (art. 6 et 7)

Le projet prévoit d’abord des dérogations générales, notamment en matière d’obligations contractuelles dans les contrats conclus avec des consommateurs.

Le projet instaure ensuite la possibilité de restreindre, à certaines conditions, la libre circulation d’un service de la société de l’information fourni par un prestataire établi dans un autre Etat membre de l’Union européenne.

Informations générales à fournir (art. 8)

Les prestataires de services de la société de l’information doivent assurer un accès facile, direct et permanent aux informations de base concernant leurs activités (nom, adresse, adresse de courrier électronique, numéro d’immatriculation au registre du commerce, titre professionnel et affiliation à des organismes professionnels, numéro de TVA, ou encore le site web où peut être consulté le code de conduite auquel le prestataire est éventuellement soumis).

Pour les sites web, il s’agira d’afficher en bas d’écran de chaque page un lien hypertexte renvoyant à ces mentions. En matière de contrats électroniques passés avec des consommateurs, le projet complète la loi du 14 juillet 1991.

Informations particulières à fournir (art. 9)

Le projet impose certaines obligations d’information pour la conclusion des contrats électroniques.

Ainsi, sauf convention contraire entre professionnels, le prestataire de services devra fournir, avant que le destinataire du service ne passe sa commande, et de manière
claire, compréhensible, et non équivoque, une série d’informations (notamment les différentes étapes techniques à suivre pour conclure le contrat, ou les moyens techniques pour identifier et corriger des erreurs commises dans la saisie des données avant que la commande ne soit passée, les langues proposées pour la conclusion du contrat).

Prévention des risques d’erreur (art. 10)

Sauf convention contraire entre professionnels, le prestataire doit mettre à la disposition du destinataire du service des moyens techniques appropriés lui permettant d’identifier les erreurs commises dans la saisie des données et de les corriger, et ce avant la passation de la commande.

Accusé de réceptionde la commande (art. 11)

Sauf convention contraire entre professionnels, le prestataire devra accuser
réception de la commande du destinataire sans délai injustifié et par voie
électronique.

Le projet précise à cet égard que la commande et l’accusé de réception seront considérés comme étant reçus lorsque les parties auxquelles ils sont adressés pourront y avoir accès. Cela signifie, par exemple, que l’internaute sera considéré comme ayant reçu l’e-mail de confirmation du site marchand lorsqu’il aura accédé à sa messagerie électronique, même s’il ne la consulte que des semaines après la commande.

Lorsque le contrat est conclu en ligne avec un consommateur, le projet de loi sur le commerce électronique est ici complété par la loi du 14 juillet 1991, en ce qu’elle impose l’envoi par le vendeur d’une confirmation au consommateur, qui doit comporter une série de mentions, et ce notamment par e-mail.

Ces dispositions ne sont pas applicables aux contrats conclus exclusivement au moyen de communications électroniques autres que le courrier électronique. Cette exception risque de susciter des problèmes d’interprétation. Par exemple, visera-t-elle les contrats conclus par échange de SMS ?

Publicité « générale » (art. 14)

Le projet soumet les communications commerciales à certaines conditions de transparence pour renforcer la confiance du consommateur et garantir des pratiques commerciales loyales.

Ainsi, le projet impose que les publicités soient clairement identifiables comme
telles et que la personne physique ou morale pour le compte de
laquelle la communication commerciale est faite soit clairement identifiable.

Sur le web, cela devrait impliquer que les sites qui font la promotion de produits indiquent clairement qu’il s’agit de messages publicitaires.

Publicités par courrier électronique : adoption de l’opt-in ! (art. 15)

Fait remarquable : malgré les pressions de certains lobbies, le gouvernement a consacré le système de l’opt-in. Ainsi, le « spamming » est interdit sans consentement préalable, libre et spécifique du destinataire (contrairement au système de l’opt-out, dans lequel le destinataire doit s’opposer à la réception d’emails publicitaires).

Pour rappel, dans la législation belge actuelle, c’est le système de l’opt-out qui est consacré.

Un arrêté royal devra préciser les modalités de mise en oeuvre du système (registre opt-in).

Cette prise de position en faveur de l’opt-in s’inscrit dans le débat actuel (et animé) relatif à la proposition de directive « vie privée dans les communications électroniques ». En effet, la Commission européenne a présenté ce texte en juillet 2000, et y défend le système de l’opt-in. Le Parlement européen, saisi de la proposition dans le cadre de procèdure de co-décision, a préconisé de laisser aux Etats membres le choix entre l’opt-in et l’opt-out.

Toutefois, le 6 décembre 2001, les Ministres de l’Union européenne sont parvenus à un accord politique visant à n’autoriser les communications commerciales par courrier électronique que pour les personnes y ayant préalablement consenti (opt-in). Une exception est néanmoins prévue : les entreprises ayant obtenu des adresses de courriers électroniques directement auprès de leurs clients à l’occasion d’une transaction commerciale conserveront la possibilité d’en faire usage pour leurs propres prospections électroniques, à moins que leur destinataire ne s’y oppose (opt-out, voir notre actualité)

Le texte actuel de la proposition de directive demeure susceptible d’évolution.

Les professions réglementées (art. 16)

Pour les professions réglementées (telles que les avocats ou les comptables), le projet établit le principe général selon lequel la prestation de services en ligne est autorisée et que les règles nationales sur la publicité n’empêchent pas ces professions d’exploiter des sites web. Ces activités devront toutefois respecter certaines règles d’éthique professionnelle, énoncées dans les codes de conduite qui seront élaborés par les associations professionnelles.

Contrats en ligne (art. 17)

Le projet dipose que « toute exigence légale ou réglementaire de forme relative au processus contractuel est réputée satisfaite à l’égard d’un contrat par voie électronique lorsque les qualités fonctionnelles de cette exigence sont préservées. »

S’agissant de l’écrit, il ajoute :

  1. l’exigence d’un écrit est satisfaite par une suite de signes intelligibles et accessibles pour être consultés ultérieurement, quels que soient leur support et leurs modalités de transmission ;
  2. l’exigence, expresse ou tacite, d’une signature est satisfaite dans les conditions prévues soit à l’article 1322, alinéa 2, du Code civil, soit à l’article 4, § 4, de la loi du 9 juillet 2001 fixant certaines règles relatives au cadre juridique pour les signatures électroniques et les services de certification (voir à ce sujet notre chronique « La signature électronique : enfin une réalité juridique en Belgique », L’Echo, 18 octobre 2001) ;
  3. l’exigence d’une mention écrite de la main de celui qui s’oblige peut être satisfaite par tout procédé garantissant que la mention émane de ce dernier.

Le projet prévoit toutefois des exceptions pour certains contrats particuliers (ventes immobilières, contrats notariés, conventions de divorce etc.).

Responsabilité des intermédiaires (art. 19 à 21)

Le projet exonère de toute responsabilité les intermédiaires qui jouent un rôle passif en assurant le « simple transport » d’informations provenant de tiers (fournisseurs d’infrastructure et d’accès) et limite la responsabilité des prestataires de services pour les activités de stockage d’information (fournisseurs d’hébergement).

Ainsi, les fournisseurs d’infrastructure (tels que Belgacom pour le réseau téléphonique) et les fournisseurs d’accès ne pourront être responsables des informations transmises, à condition qu’ils ne soient pas à l’origine de la transmission, et ne sélectionnent pas le destinataire de la transmission ou les informations faisant l’objet de celle-ci.

Le projet prévoit également un régime d’exonération similaire pour les fournisseurs de services de « caching ».

En ce qui concerne les fournisseurs d’hébergement, ils sont exonérés de toute responsabilité pour les informations stockées sur leurs serveurs à condition :

  1. qu’ils n’aient pas une connaissance effective de l’activité ou de l’information illicite ou, en ce qui concerne une action civile en réparation, qu’ils n’aient pas connaissance de faits ou de circonstances laissant apparaître le caractère illicite de l’activité ou de l’information ; ou

  2. qu’ils agissent promptement, dès le moment où ils ont de telles connaissances, pour retirer les informations ou rendre l’accès à celles-ci impossible.

  3. qu’ils avertissent sur le champ le Procureur du Roi qui prend les mesures utiles. Aussi longtemps que le Procureur n’a pris aucune décision, le prestataire peut uniquement prendre des mesures visant à empêcher l’accès aux informations. Cette condition a été ajoutée par rapport à la directive.

Il est dommage que le projet n’ait pas prévu de procédures régissant la notification et le retrait des informations ou les diligences requises pour rendre l’accès à ces dernières impossible.

Le projet précise que les prestataires n’ont aucune obligation générale de surveiller les informations qu’ils transmettent ou stockent, ni aucune obligation générale de rechercher activement des faits ou des circonstances révélant des activités illicites.

Mais il est ajouté que les autorités judiciaires peuvent imposer une obligation temporaire de surveillance dans un cas spécifique, lorsque cette possibilité est prévue par la loi.

Enfin, les fournisseurs d’hébergement sont tenus de communiquer aux autorités compétentes les informations permettant d’identifier les propriétaires des pages hébergées.

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