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Innnovation et secret d’affaire : vers une protection uniforme dans l’Union européenne

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L’innovation est au centre de l’essor économique de l’Union européenne, et pourtant la notion de « secret d’affaire » reste très nationale. Difficile à justifier à l’heure du marché unique. La Commission européenne a donc publié une proposition de directive. Il était temps !

Une protection à géométrie variable

Le savoir-faire d’une entreprise – fruit de ses investissements et de sa créativité commerciale – constitue, dans le contexte économique actuel, un élément déterminant dans le développement et le maintien de sa position concurrentielle. Habituellement, les entreprises parlent de leur « secret d’affaires ». Cette notion vise dans les faits toute information (technologie, recette, données marketing,…) ayant une valeur économique et dont la confidentialité est (devrait être) protégée par des mesures appropriées par son propriétaire.

Les droits de propriété industrielle traditionnels tels brevets, marques, dessins et modèles  et leurs conditions de protection strictes délaissent ainsi une grande partie de connaissances et informations pourtant nécessaires à la croissance économique de l’entreprise. Ce sont celles-là mêmes que le secret d’affaires permettra de protéger. C’est le procédé le plus fréquemment employé par les PME à cette fin, même si souvent, elles ne sont pas conscientes de leur dépendance à l’égard des ces actifs et ignorent qu’ils font l’objet d’une protection par la loi à ce titre.

Le contenu exact de la notion de « secret d’affaires » n’est à ce jour pas uniforme dans l’Union européenne.

C’est dans l’Accord sur les ADPIC (relevant de l’O.M.C.) qu’il faut aller chercher ce qui se rapproche le plus d’une définition harmonisée : une information secrète à savoir généralement inconnue des milieux intéressés ou difficilement accessible, ayant une valeur commerciale par son caractère confidentiel, et faisant l’objet de mesures raisonnables prises par l’entreprise pour en assurer la confidentialité.

Pour le reste le secret d’affaires ne bénéficie donc pas d’un régime de protection juridique uniforme dans l’Union européenne. L’entreprise prévoira bien évidemment des accords de non-divulgation dans ses contrats dès le moment où des renseignements confidentiels sont divulgués, mais quelle en est l’utilité si la protection ne peut être mise en œuvre à l’étranger? La remarque prend tout son sens à une époque où l’espionnage industriel est un sujet de préoccupation particulier, surtout dans les secteurs où la recherche et le développement – et par conséquent les investissements financiers – jouent un rôle majeur (automobile, télécommunications, pharmaceutique,…).

La réflexion européenne matérialisée dans une proposition de directive

C’est sur ce constat que la Commission européenne a lancé une enquête clôturée en avril 2013, concluant à la nécessité d’une harmonisation au niveau européen, comme elle existe aux Etats-Unis par exemple. Le marché s’était déclaré demandeur d’une initiative législative européenne sur le secret d’affaires, ceci afin d’améliorer notamment la coopération interétatique, d’augmenter les possibilités d’investissements et le rendement du savoir-faire.

La Commission a publié ce 28 novembre 2013 une proposition de Directive (n° 2013/0402) sur la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulguées (secrets d’affaires) contre l’obtention, l’utilisation et la divulgation illicites.

La notion de « savoir-faire » est enfin définie par un instrument européen. Il s’agit des informations qui :

  • sont « secrètes en ce sens que, dans leur globalité ou dans la configuration et l’assemblage exact de leurs éléments, elles ne sont pas généralement connues de personnes appartenant aux milieux qui s’occupent normalement du genre d’informations en question, ou ne leur sont pas aisément accessibles » ;
  • ont une valeur commerciale parce qu’elles sont secrètes ;
  • ont fait l’objet, de la part de la personne qui en a licitement le contrôle, de dispositions raisonnables, compte tenu des circonstances, destinées à les garder secrètes.

L’obtention est ainsi considérée comme illicite lorsqu’elle résulte, intentionnellement ou à la suite d’une négligence grave, d’un accès non-autorisé à tout support contrôlé par le détenteur légitime, d’un vol, d’un acte de corruption, d’un abus de confiance, du non-respect d’un accord de confidentialité et, de manière générale, de tout comportement contraire aux usages honnêtes en matière commerciale.

Est considérée comme illicite l’utilisation ou la divulgation par une personne qui a obtenu ce secret illicitement, qui agit en violation d’un accord de confidentialité ou viole une obligation de ne l’utiliser que de manière limitée. La personne qui savait ou aurait du savoir que le secret avait été obtenu illicitement y est assimilée.

Il est toutefois rappelé qu’aucun droit exclusif n’est créé (à l’instar d’un brevet par exemple), et qu’il est donc possible d’obtenir licitement ledit secret (par exemple, par une création indépendante ou du « reverse engineering »).

Les Etats devront prendre, en vue de limiter et sanctionner ce type de comportement illicite des mesures (i) juste et équitables, (ii) qui ne soient pas inutilement complexes et coûteuses et n’entrainent pas un retard de traitement injustifié, (iii) effectives et dissuasives. Elles devront cependant, au terme d’une clause de sauvegarde,  être proportionnées et éviter tant un obstacle au commerce légitime qu’un usage abusif (atteinte à la concurrence,…). A cet effet, il conviendra d’avoir égard à la valeur du secret, aux mesures prises pour le protéger, au comportement du contrevenant,  aux incidences de la divulgation illicite et aux intérêts légitimes des parties en présence.

Vu la nature de ces informations, il sera nécessaire de veiller à respecter leur caractère confidentiel au cours d’une procédure judiciaire. Des mesures doivent viser à restreindre l’accès aux documents, rapports, ou audiences lorsque des secrets d’affaires risquent d’y être divulgués et de mettre à disposition des versions non-confidentielles des décisions judiciaires.

Assez classiquement, des mesures provisoires doivent être prévues, en respectant les intérêts légitimes de part et d’autre. Tout aussi classiquement, une action au fond devra être introduite dans un certain délai, sous peine de voir ces mesures provisoires abrogées.

Les injonctions pouvant être prononcées sont la cessation, l’interdiction de produire/commercialiser, et l’application de mesure correctives (rappel, adaptation, destruction). Il est toutefois prévu que ces mesures puissent être remplacées par une indemnisation pécuniaire si la personne a obtenu les informations de bonne foi, si ces mesures entraîneraient pour elle un dommage disproportionné et si une telle indemnisation semble raisonnablement satisfaisante.

Les dommages-intérêts alloués sur demande de la partie lésée devront correspondre au préjudice réellement subi, mais en prenant en compte tous les aspects du dommage (matériel et moral). Toutefois, le juge pourra recourir à un montant forfaitaire, dans les « cas appropriés », par exemple calculé sur la base des redevances ou droits qui auraient été dus en cas d’utilisation autorisée.

La Commission assimile clairement le secret d’affaires à une forme de propriété intellectuelle, même s’il ne s’agit pas d’un droit classique. La protection mise en place au terme de cette directive est effectivement très proche, pour ne pas dire identique, aux procédures prévues pour les autres droits tels droits d’auteur, marques, brevets,… (aux termes de la Directive CE 2004/48).

Cette proposition doit maintenant être transmise au Conseil des ministres et au Parlement européen en vue d’être adoptée selon la procédure législative ordinaire. Ceci est prévu, selon le planning envisagé par la Commission, pour fin 2014. Les Etats membres devraient ensuite disposer d’un délai de 24 mois pour transposer la prochaine directive dans leur droit national.

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