Cabinet d’avocats franco-belge, moderne et humain,
au service de la création et de l’innovation

9 pôles d’activités dédiés au
droit de la création et de l’innovation

Nos activités scientifiques & académiques

Faisons connaissance !

Un procès en vue ?
Lisez le guide destiné à mieux vous préparer

Le portail du droit des technologies, depuis 1997
Powered by

Un site pour tout savoir sur le RGPD
Powered by

Distribution en ligne : interdire aux distributeurs de vendre en ligne est le plus souvent contraire au droit européen

Publié le par - 100 vues

Une clause d’un contrat de distribution sélective interdisant aux distributeurs de la société Pierre Fabre Dermo-Cosmétique de vendre ses produits par Internet, constitue une restriction de concurrence « par objet », à moins que cette clause ne soit objectivement justifiée. Une telle interdiction ne peut bénéficier d’une exemption par catégorie mais pourrait, sous certaines conditions, bénéficier d’une exemption individuelle.

L’article 101 TFUE interdit les accords ayant pour objet ou effet de restreindre la concurrence. L’article 101, paragraphe 3, TFUE prévoit que, dans certaines conditions, les accords qui améliorent la distribution des produits ou contribuent à promouvoir le progrès économique peuvent se voir accorder une exemption individuelle. En outre, divers règlements prévoient que certaines catégories d’accords peuvent bénéficier d’une exemption par catégorie. L’un de ces règlements, le règlement relatif à l’exemption par catégorie des accords verticaux, prévoit une telle exemption pour les accords de distribution qui remplissent certaines conditions. Toutefois, ce règlement contient une liste d’accords qui ne peuvent pas bénéficier d’une exemption par catégorie.

Pierre Fabre Dermo-Cosmétique (« PFDC ») est l’une des sociétés du groupe Pierre Fabre. Elle a pour activité la fabrication et la commercialisation de produits cosmétiques et d’hygiène corporelle et dispose de plusieurs filiales parmi lesquelles, notamment, les laboratoires Klorane, Ducray, Galénic et Avène, dont les produits cosmétiques et d’hygiène corporelle sont vendus, sous ces marques, majoritairement par l’intermédiaire de pharmaciens, sur le marché français comme sur le marché européen.

Les produits en cause n’entrent pas dans la catégorie des médicaments et échappent, dès lors, au monopole des pharmaciens prévu par la législation française. Toutefois, les contrats de distribution de ces produits concernant les marques Klorane, Ducray, Galénic et Avène précisent que les ventes doivent exclusivement être réalisées dans un espace physique et en présence d’un diplômé en pharmacie, limitant ainsi en pratique toute forme de vente sur Internet.

En octobre 2008, à la suite d’une enquête, l’Autorité française de la concurrence a décidé que, du fait de l’interdiction de facto de toute vente sur Internet, les accords de distribution de PFDC constituaient des accords anticoncurrentiels contraires aussi bien à la législation française qu’au droit de la concurrence de l’Union européenne. En effet, l’Autorité de la concurrence a estimé que l’interdiction de vendre sur Internet avait nécessairement pour objet de restreindre la concurrence et ne pouvait pas bénéficier d’une exemption par catégorie. Cette autorité a en outre décidé que ces accords ne pouvaient pas non plus bénéficier d’une exemption individuelle.

PFDC a introduit un recours contre cette décision devant la cour d’appel de Paris (France), laquelle a demandé à la Cour de justice si une interdiction générale et absolue de vendre sur Internet constitue une restriction de la concurrence « par objet », si un tel accord peut bénéficier d’une exemption par catégorie, et si, lorsque l’exemption par catégorie est inapplicable, cet accord peut bénéficier d’une exemption individuelle au titre de l’article 101, paragraphe 3, TFUE.

Par son arrêt de ce jour, la Cour rappelle qu’aux fins d’apprécier si une clause contractuelle comporte une restriction de concurrence « par objet », il convient de s’attacher à la teneur de la clause, aux objectifs qu’elle vise à atteindre ainsi qu’au contexte économique et juridique dans lequel elle s’insère.

S’agissant des accords qui constituent un système de distribution sélective, la Cour a déjà relevé qu’ils influencent nécessairement la concurrence dans le marché commun. De tels accords sont à considérer, à défaut de justification objective, en tant que « restrictions par objet ». Toutefois, un système de distribution sélective est conforme au droit de l’Union pour autant que le choix des revendeurs s’opère en fonction de critères objectifs de caractère qualitatif, fixés d’une manière uniforme à l’égard de tous les revendeurs potentiels, et appliqués de façon non discriminatoire, que les propriétés du produit en cause nécessitent, pour en préserver la qualité et en assurer le bon usage, un tel réseau de distribution et, enfin, que les critères définis n’aillent pas au-delà de ce qui est nécessaire.

Après avoir rappelé qu’il appartient à la juridiction de renvoi d’examiner si une clause contractuelle qui interdit de facto toutes les formes de vente par Internet peut être justifiée par un objectif légitime, la Cour lui fournit à cet effet des éléments d’interprétation du droit de l’Union afin de lui permettre de se prononcer.

Ainsi, la Cour souligne qu’elle n’a pas retenu, au regard des libertés de circulation, les arguments relatifs à la nécessité de fournir un conseil personnalisé au client et d’assurer sa protection contre une utilisation incorrecte de produits dans le cadre de la vente de médicaments qui ne sont pas soumis à prescription médicale et de lentilles de contact, pour justifier une interdiction de vente par Internet. De même, la Cour juge que la nécessité de préserver l’image de prestige des produits de PFDC ne saurait constituer un objectif légitime pour restreindre la concurrence.

En ce qui concerne la possibilité pour le contrat de distribution sélective de bénéficier d’une exemption par catégorie, la Cour rappelle que cette exemption ne s’applique pas aux accords verticaux qui ont pour objet la restriction des ventes actives ou des ventes passives aux utilisateurs finals par les membres d’un système de distribution sélective qui opèrent en tant que détaillants sur le marché. Or, une clause contractuelle qui interdit de facto Internet comme mode de commercialisation a, à tout le moins, pour objet de restreindre les ventes passives aux utilisateurs finals désireux d’acheter par Internet et localisés en dehors de la zone de chalandise physique d’un membre du système de distribution sélective. Par conséquent, l’exemption par catégorie ne s’applique pas à ce contrat.

En revanche, un tel contrat peut bénéficier, à titre individuel, de l’applicabilité de l’exception légale de l’article 101, paragraphe 3, TFUE si la juridiction de renvoi constate que les conditions prévues par cette disposition sont réunies.

Droit & Technologies

Soyez le premier au courant !

Inscrivez-vous à notre lettre d’informations

close

En poursuivant votre navigation sur notre site, vous acceptez l’utilisation de cookies afin de nous permettre d’améliorer votre expérience utilisateur. En savoir plus

OK