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Dispositif médical non conforme : qui est responsable ?

Publié le par - 2930 vues

Tout en soulignant que la responsabilité du fait d’un dispositif non conforme repose en premier lieu sur le fabricant, la Cour admet qu’il est possible d’étendre cette responsabilité à « l’organisme notifié » qui intervient dans le cadre de la procédure relative à la déclaration « CE » de conformité. La Cour admet que pareil organisme n’a pas d’obligation générale de surveillance mais, en présence d’indices suggérant qu’un dispositif médical est susceptible d’être non conforme aux exigences découlant de la directive, il doit prendre toutes les mesures nécessaires afin de s’acquitter de ses obligations prévues par la directive.

En décembre 2008, Mme Elisabeth S. s’est fait poser en Allemagne des implants mammaires en silicone fabriqués par l’entreprise française Poly Implant Prothèse (PIP). En 2010, les autorités françaises ont constaté que cette entreprise avait utilisé de la silicone industrielle de moindre qualité pour fabriquer les implants. Sur avis médical, Mme S. s’est alors fait retirer ses implants en 2012.

Mme S. a ensuite introduit une action devant les juridictions allemandes, par laquelle elle demande des dommages et intérêts d’un montant de 40 000 euros au titre du préjudice moral subi ainsi qu’une déclaration ouvrant la voie à la réparation de tout préjudice matériel qu’elle pourrait subir à l’avenir en raison des implants défectueux.

Le fabricant ayant fait faillite, Mme S. a dirigé son action à l’encontre de TÜV Rheinland LGA Products, une entreprise allemande chargée, en tant qu’« organisme notifié » au sens de la directive sur les dispositifs médicaux, de la surveillance du système de qualité du fabricant.

Saisi d’un pourvoi, le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice, Allemagne) interroge la Cour sur la nature des obligations incombant aux organismes notifiés et sur la portée de leur responsabilité à l’égard des patients en cas de manquement à leurs obligations.

Pas d’obligation générale de contrôle

La Cour répond que, selon cette directive, un organisme notifié qui, tel le TÜV, intervient dans le cadre de la procédure relative à la déclaration CE de conformité n’est pas tenu de manière générale d’effectuer des inspections inopinées, de contrôler les dispositifs et/ou d’examiner les documents commerciaux du fabricant.

Cependant …

La Cour poursuit son analyse en estimant cependant qu’en présence d’indices suggérant qu’un dispositif médical est susceptible d’être non conforme aux exigences découlant de la directive, un tel organisme doit prendre toutes les mesures nécessaires afin de s’acquitter de ses obligations prévues par la directive.

La Cour constate par ailleurs que l’intervention de l’organisme notifié dans le cadre de la procédure relative à la déclaration CE de conformité vise à protéger les destinataires finaux des dispositifs médicaux. Toutefois, les conditions dans lesquelles un manquement fautif de cet organisme aux obligations prévues par la directive dans le cadre d’une telle procédure peut être de nature à engager sa responsabilité à l’égard des destinataires relèvent du droit national, sous réserve des principes d’équivalence et d’effectivité.

L’avis de l’AG

La Cour a suivi largement son avocat général qui estimait que la directive, tout en prévoyant que la responsabilité du fait des produits défectueux repose en premier lieu sur le fabricant, n’empêche pas d’étendre cette responsabilité à d’autres acteurs. Il soulignait que la Cour a déjà admis que, s’agissant d’obligations spécifiques découlant des règles de l’Union relatives à la sécurité des produits, une législation nationale puisse imposer une telle responsabilité aux importateurs.

À cet égard, l’avocat général observe que, dès lors qu’un État membre peut imposer une telle responsabilité aux importateurs – lesquels jouent un rôle relativement mineur dans la garantie de la sécurité des produits – il doit également être en droit de le faire vis-à-vis des organismes notifiés qui, eux, jouent un rôle crucial en la matière. Dans de telles circonstances, l’avocat général considère que de tels organismes sont susceptibles de voir leur responsabilité engagée à l’égard des patients et des utilisateurs en cas de manquement fautif à leurs obligations découlant des règles de l’Union relatives à la sécurité des produits, pour autant que les principes d’équivalence 3 et d’effectivité 4 soient respectés.

S’agissant de la nature des obligations incombant aux organismes notifiés, l’avocat général considère qu’il peut généralement être présumé que les fabricants agissent conformément à leur système de qualité approuvé, les organismes notifiés pouvant se fonder sur une telle présomption. Dès lors, les organismes notifiés ne sont pas soumis à l’obligation générale d’inspecter les dispositifs, d’examiner les documents commerciaux du fabricant ou de procéder à des inspections inopinées.

Néanmoins, si un organisme notifié est informé qu’un dispositif médical est susceptible d’être défectueux, il est soumis à l’obligation d’exercer les prérogatives dont il dispose au titre de la directive afin de déterminer si la certification qu’il délivre pour ce dispositif peut être maintenue. Dans ce contexte, il appartient à l’organisme en cause de choisir, au regard de ses compétences scientifiques, les moyens d’action ainsi que les mesures précises qu’il souhaite prendre, à condition de toujours agir avec la diligence et les précautions requises.

Enfin, compte tenu du risque de répercussions économiques sérieuses de la solution qu’elle propose, l’avocat général propose à la Cour de limiter dans le temps les effets de son arrêt. La Cour a spécifiquement refusé.

En secteur en transition

Il existe plus de 500 000 types de dispositifs médicaux (y compris les dispositifs médicaux de diagnostic in vitro) sur le marché de l’UE, par exemple les lentilles de contact, les appareils de radiographie, les stimulateurs cardiaques, les implants mammaires, les prothèses de hanche, ou encore les emplâtres adhésifs.

Le secteur pèse lourd, très lourd, aussi bien en emplois qu’en recherche et développement. Il pèse d’autant plus lourd qu’il est souvent composé d’entreprises européennes (des grosses PME) qui luttent contre des multinationales délocalisées.

Le secteur est en pleine mutation.

C’est ainsi qu’au mois d’avril, l’UE a accouché après 5 ans d’un nouveau règlement qui réforme le cadre juridique applicable. (Voir notre actu précédente)

Le secteur va aussi devoir intégrer les enseignements de l’arrêt commenté ci-dessus. Il y a probablement un travail à faire au niveau des contrats et une réflexion globale à entretenir avec les circuits de certification et de distribution.

Droit & Technologies

Annexes

Arrêt rendu par la CJUE

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Conclusions de l’avocat général

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