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Factures téléphoniques détaillées et portabilité des numéros de téléphone : la Cour de justice condamne l’Autriche et la France

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Deux récents arrêts de la Cour de justice européenne sont venus considérablement renforcer les droits des consommateurs. Dans un premier arrêt du 14 septembre, la Cour a déclaré que les règles sur la protection des données à caractère privé n’empêchent pas les opérateurs téléphoniques de fournir des factures faisant apparaître les appels individuels, et qu’il…

Deux récents arrêts de la Cour de justice européenne sont venus considérablement renforcer les droits des consommateurs. Dans un premier arrêt du 14 septembre, la Cour a déclaré que les règles sur la protection des données à caractère privé n’empêchent pas les opérateurs téléphoniques de fournir des factures faisant apparaître les appels individuels, et qu’il n’y a pas lieu de faire payer le consommateur pour ce service (affaire C-411/02). L’Autriche n’imposait pas un niveau de détail suffisant dans la facture, au motif que cela aurait constitué une violation de la vie privée de l’individu ; pour la Cour, les deux ne sont pas incompatibles. Dans un autre arrêt prononcé le 9 septembre en matière de téléphonie vocale, la Cour a estimé que la France a manqué à son obligation de veiller à ce qu’à compter du 1er janvier 2000, tous les abonnés puissent conserver leur numéro de téléphone du réseau téléphonique public fixe lorsqu’ils changent de fournisseur de services téléphoniques (affaire C-113/03).

La facture détaillée

L’action était mue à la requête de la Commission qui demandait à la Cour de constater que, en ayant opté pour une facturation consistant en un relevé des montants uniquement classés par types de frais et ne faisant pas apparaître un niveau de détail suffisant pour garantir au consommateur un contrôle et une vérification efficaces, la république d’Autriche a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 14, paragraphe 2, de la directive 98/10/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 1998, concernant l’application de la fourniture d’un réseau ouvert (ONP) à la téléphonie vocale et l’établissement d’un service universel des télécommunications dans un environnement concurrentiel (JO L 101, p. 24, ci-après la «directive»).

L’article 14 de la directive prévoit que « les utilisateurs peuvent, par l’intermédiaire des réseaux téléphoniques publics fixes, accéder le plus rapidement possible: (…) à la facturation détaillée et à l’interdiction sélective des appels, sur demande » (…) et précise que « La facturation détaillée de base est disponible sans frais supplémentaires pour l’utilisateur. S’il y a lieu, une présentation encore plus détaillée peut être proposée à l’abonné à un tarif raisonnable ou gratuitement. Le niveau de base de la facturation détaillée peut être fixé par les autorités réglementaires nationales ».

En comparaison, la législation autrichienne ( le Telekommunikationsgesetz ou loi fédérale relative aux télécommunications, BGBl. I, n° 10/1997, en abrégé TKG ainsi que quatre décrets) stipule que : «1. Les frais des abonnés doivent être présentés sous la forme d’une facturation consistant en un relevé des montants classés par types de frais. Si l’abonné le demande, la facturation doit faire apparaître tous les montants ou avoir un autre niveau de détail, à déterminer dans les conditions commerciales. Pour les facturations présentant un niveau de détail supérieur à la facturation standard, une rétribution peut être prévue dans les conditions commerciales. Le montant de ladite rétribution doit être déterminé en fonction des coûts occasionnés par la présentation plus détaillée » (article 94, paragraphe 1, TKG).

La Commission ne s’en contente pas notamment parce que cette disposition permettrait une pratique des opérateurs consistant à regrouper, sur la facture, les montants par catégories d’appels, sans présenter chaque appel séparément.

Le gouvernement autrichien se retranchait derrière le principe général de protection des données à caractère personnel. Il est indiscutable que ce principe demeure comme le rappelle du reste explicitement l’article 14, 2, de la directive : « Sous réserve des exigences de la législation applicable en matière de protection des données à caractère personnel et de la vie privée, comme la directive 95/46/CE et la directive 97/66/CE, les factures détaillées font apparaître un niveau de détail suffisant pour permettre la vérification et le contrôle des frais inhérents à l’utilisation du réseau téléphonique public fixe et/ou des services téléphoniques publics fixes ».

La cour de justice ne l’entend pas de cette oreille :

S’agissant ensuite de l’affirmation selon laquelle les factures comportant un niveau de détail tel qu’exigé par la Commission incluraient nécessairement des informations contraires à la législation relative à la protection de la vie privée et des données à caractère personnel, il y a lieu de relever que le gouvernement autrichien n’a aucunement étayé cette affirmation par une argumentation circonstanciée permettant à la Cour d’apprécier son bien-fondé.

Dans ces conditions, il convient de constater que, en ayant opté pour une facturation consistant en un relevé des montants uniquement classés par types de frais et ne faisant pas apparaître un niveau de détail suffisant pour garantir au consommateur un contrôle et une vérification efficaces, la république d’Autriche a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 14, paragraphe 2, de la directive.

Et la cour de rappeler que même si la législation européenne ne fixe pas le niveau de détail à atteindre, la finalité du système est évidente : « Une facturation qui fait uniquement apparaître le nombre d’appels, le total des unités tarifaires utilisées et le prix global correspondant ne permet donc pas la vérification et le contrôle des frais inhérents à l’utilisation du réseau téléphonique public fixe exigé à l’article 14, paragraphe 2, de la directive».

La portabilité des numéros de téléphone

La directive 97/33 dispose, à son article 12, paragraphe 5, que :

« Les autorités réglementaires nationales encouragent l’introduction au plus tôt du service de portabilité du numéro de l’opérateur permettant à l’abonné qui le demande de conserver son (ses) numéro(s) dans le réseau téléphonique public fixe et le réseau numérique à intégration de services (RNIS), quel que soit l’organisme prestataire de services, en un lieu spécifique dans le cas de numéros géographiques et en un lieu quelconque dans le cas de numéros autres que géographiques, et veillent à ce que ce service soit disponible le 1er janvier 2000 au plus tard […] ».

La notion de numéro géographique est aussi définie à l’article 2, paragraphe 1, sous i), de la directive 97/33, comme « un numéro du plan national de numérotation dont une partie de la structure numérique contient une signification géographique utilisée pour acheminer les appels vers le lieu physique du point de terminaison du réseau de l’abonné auquel le numéro a été attribué ».

La Commission fait valoir qu’il n’existait pas en France de services permettant aux abonnés de conserver leurs numéros non géographiques, quel que soit l’organisme prestataire de services, ce qui est contraire aux dispositions de l’article 12, paragraphe 5, de la directive 97/33.

Mais concrètement, qu’est ce qu’un numéro non géographique ? Selon la décision nº 98-1046 de l’Autorité de régulation des télécommunications, du 23 décembre 1998, relative à l’évolution du plan de numérotation pour les numéros non géographiques de la forme 08ABPQMCDU (JORF du 4 février 1999, p. 1821), les numéros non géographiques sont subdivisés en trois groupes correspondant :

  1. aux services libre-appel, gratuits pour l’appelant,

  2. aux services à coût partagé, dont le coût est partagé entre l’appelant et l’appelé,

  3. aux services à revenus partagés, pour lesquels l’utilisateur appelé bénéficie d’un reversement par le fournisseur du service de télécommunications.

Il est inutile de dire que ces numéros sont stratégiques et font l’objet, entre opérateurs, d’une très vive concurrence. Quand une émission de télévision permet de voter par téléphone à un numéro non géographique et reçoit 1.000.000 d’appels sur la soirée, il est important de savoir si elle perçoit 50 ou 60% du coût payé par l’appelant.

C’est là que la portabilité entre en jeu : le numéro doit pouvoir rester le même, que le producteur de l’émission se fournisse chez tel opérateur ou chez son voisin.

Les autorités françaises ont admis dans une note du 1er février 2001 qu’un certain retard avait été pris dans la mise en œuvre effective de la portabilité des numéros non géographiques en raison d’erreurs dans la réalisation du système technique initialement envisagé, mais ont assuré qu’une autre solution avait été retenue, dont l’élaboration était en cours :

  1. S’agissant de la portabilité des numéros non géographiques permettant l’accès aux services à coût partagé et à revenus partagés, le gouvernement français observe que des avenants types aux conventions d’interconnexion relatifs à la portabilité de ces deux groupes de numéros ont été finalisés respectivement en janvier 2002 et en décembre 2002. Selon lui, les conditions juridiques, techniques et opérationnelles de la mise en œuvre de la portabilité de ces numéros non géographiques sont ainsi réunies en France depuis décembre 2002.

  2. S’agissant de la portabilité des numéros non géographiques permettant l’accès aux services libre appel, ledit gouvernement observe qu’un premier avenant type aux conventions d’interconnexion relatif à la portabilité de ces numéros a été finalisé en avril 2001, et que des négociations entre France Télécom et les opérateurs alternatifs ont débuté en mai 2001 et ont abouti à un premier accord complet le 1er juillet 2001.

Pour la cour tout cela est très bien mais est intervenu trop tard. La France est donc condamnée.

Plus d’infos ?

En lisant l’arrêt de la cour de justice consacré au niveau de détail à atteindre lors de la facturation

En lisant l’arrêt de la cour de justice consacré à la portabilité des numéros de téléphone non géographiques.

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