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Validité des Creative Commons face au droit français

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Bien que la protection des œuvres sur Internet soit fidèlement encadrée par le Code de la propriété intellectuelle, ce dernier n’est pas identique dans tous les pays. International, l’Internet n’est pas gouverné mondialement, mais est composé d’une multitude de législations se juxtaposant et sanctionnant plus ou moins sévèrement les écarts de conduite en fonction du lieu de l’infraction. Dans ce contexte, protéger son œuvre dans le monde entier relève d’un travail herculéen, à moins d’en contrôler pleinement sa diffusion. Afin de prévenir ce genre de situation, l’organisation Creative Commons propose une protection des œuvres identique pour l’ensemble de la planète s’adaptant aux législations nationales. Bien que peu utilisée, cette méthode garantie à l’auteur un contrôle maximum sur son œuvre, puisqu’il choisit lui-même l’étendue des critères de protection.

Le projet trouve son origine dans la philosophie de l’Internet, libre et participatif, en proposant de multiples choix pour gérer au mieux la diffusion et la reproduction de son ouvre (Paragraphe 1). Véritables contrats à valeur juridique forte (Paragraphe 2), les licences Creative Commons se conforment aux législations nationales et au Code de la propriété intellectuelle français (Paragraphe 3).

Paragraphe 1 – Origine et fonctionnement

Les licences Creative Commons (CC) sont apparues en 2001 sous l’impulsion du Professeur Lawrence Lessig de l’Université de Standford en Californie. Après avoir été un fervent défenseur de l’allégement du droit d’auteur américain , il lance, avec James Boyle et Yochai Benkler, le projet afin de fournir aux auteurs des licences leur permettant d’autoriser largement la réutilisation et la circulation de leurs créations. Le projet vise, à l’origine, la protection, la distribution, la copie et la modification des logiciels dits Open Source. Proposée dans 45 pays , ces licences visent finalement tous les types de contenu, qu’il s’agisse de texte, son, images, vidéos. Partant de la philosophie de Richard Stallman et de la licence GNU GPL, les pionniers des Creative Commons se sont demandé comment ne pas spolier une œuvre dès lors qu’elle est diffusée sur le Web.
Entre la rétention totale par le Copyright et un monde d’anarchie où les auteurs savourent une liberté sans limite mais sont dès lors vulnérables à l’exploitation illicite de leurs œuvres, les licences Creative Commons tentent de trouver le juste milieu : « Share what you want, keep what you want ». Ce slogan de Creative Commons représente à lui seul la recherche d’un juste milieu entre le Copyright et le Copyleft, autorisant les auteurs à diffuser librement leurs œuvres tout en leur réservant certains droits.

L’approche des Creative Commons s’inspire du modèle des logiciels libres, sur le plan de l’innovation et de la mise en œuvre de motivations coopératives . L’idée que de tels mécanismes devait également être possible dans le champ de l’information et des contenus. L’immense développement de l’information librement accessible existe sous la forme des pages Web, qui sous-entend une coopération gratuite de mise à disposition et d’échange de l’information. Les Creative Commons explicitent alors un projet encourageant le fait accompli volontaire de construction d’un nouveau bien commun, auquel l’ensemble des individus auraient accès.

Dans un contexte technologique et social dans lequel l’interpénétration entre l’autoproduction de contenus et la communication interpersonnelle est exponentielle, le développement d’une licence permettant une circulation beaucoup plus libre d’information, tout en protégeant mondialement son auteur, est une avancée juridique majeure. Cette interpénétration se manifeste aussi bien dans les dispositifs matériels que dans les usages de cette information produite par le consommateur. Elle se retrouve diffusée aussi bien par des courriels que sur des blogs, des pages Web, des sites de mutualisation de contenu personnel et d’échange sur les réseaux peer to peer, puis elle est réutilisée dans ces mêmes médias par la communauté avoisinante. Une des conséquences de cette mutation est l’érosion de la distinction entre la sphère privée et la publication, à laquelle les industries d’édition centralisée répondent par la demande de durcissement juridique et de surveillance ou de contrôle technique. Les diverses licences Creative Commons (Sous-paragraphe 1) s’efforcent, quant à elles, de répondre par la définition de nouveaux droits d’usage adaptés aux diverses situations (Sous-paragraphe 2).

Typologie des licences Creative Commons

Les licences Creative Commons jouent un rôle clé dans les modèles de production et d’échanges associés et ont une conséquence sur les opportunités de service apporté. La caractéristique fondamentale de ces licences est leur aspect modulaire. Cette souplesse porte aussi bien sur les droits d’usage que sur les dispositions spécifiques pour les médias. Deux variables régissent les droits d’usage, l’autorisation ou non d’un usage commercial et le degré auquel il est permis de redistribuer des œuvres modifiées. L’indication de l’auteur et de l’origine de l’œuvre n’est plus une option, mais une obligation commune à toutes les licences, en cohérence avec la Convention de Berne telle qu’amendée en 1948.

L’auteur peut ainsi combiner les différentes conditions afin de trouver la licence la mieux adaptée à l’œuvre qu’il souhaite diffuser, préservant ainsi ses droits en fonction de ses aspirations.

Le travail de vulgarisation et de simplification, avec l’utilisation de pictogrammes, des licences Creative Commons les rendent accessibles par l’ensemble des utilisateurs, contrairement aux licences beaucoup plus complexes des logiciels payants ou même des licences libres.

La diffusion de cette licence se fait sous trois formes. Une version graphique reprend les icônes des conditions d’utilisation de base, qui explique les droits et devoirs sommairement, vers laquelle est renvoyé l’utilisateur en cliquant sur le lien Creative Commons. Une version légale et rédigée dans le jargon juridique est accessible aussi par un lien. C’est d’ailleurs la seule version légale et conforme à la législation, les autres servant d’aide informative aux utilisateurs. Une dernière version est distribuée en méta-données, RDF, faisant partir intégrante du code HTML. Elle est fournie lorsque l’auteur remplit le formulaire en ligne.

Internationalisation

Différents types d’usage et d’échange de l’information existent et sont concomitants à la restriction juridique des types de licences auxquels ils se réfèrent. Toutefois, la multiplicité des règles juridiques à l’échelon mondial imposent qu’une harmonisation globale soit effectuée, notamment dans le contexte de l’Internet où les frontières virtuelles sont inexistantes. L’ambition essentielle des Creative Commons est de donner des licences de portée internationale en les traduisant et en les adaptant au cadre juridique de chaque pays, tout en préservant une essence universelle. Les créations culturelles ont un statut géographique et linguistique complexe. Leur portée immédiate est souvent réduite à une ère linguistique, qui ne coïncide par forcément avec une aire juridique, mais pour laquelle des correspondances ont été trouvées. En fonction du type d’œuvre, la traduction est plus ou moins indispensable pour qu’elle soit diffusée à travers le monde entier. Cependant, la musique, les images d’actualité sont tout aussi parlantes sans traduction que si elle avait subi les coups d’un traducteur. La porté de ses œuvres, traduites ou non, sur les réseaux Internet, développent malgré elles leur caractère international. C’est ainsi que les Creative Commons existent à travers les traductions en plusieurs versions linguistiques afin de répondre à cette propagation internationale d’une œuvre numérique dans la sphère virtuelle, qui n’aurait pas dépassé les limites du quartier dans la sphère physique.

Paragraphe 2 – Qualification juridique

L’objectif des licences Creative Commons (CC) est de fourni un outil juridique qui garantit à la fois la protection des droits de l’auteur d’une œuvre artistique et de la libre circulation du contenu culturel, ceci afin de permettre aux auteurs d’avoir accès à un patrimoine d’œuvres accessibles dans le domaine public.
Les documents proposés par Creative Commons sont des contrats-types qui permettent à l’auteur de communiquer au public les conditions d’utilisation de son œuvre. Il s’agit donc d’un contrat conclu et considéré comme « la manifestation de volonté (…) par laquelle une personne propose à une ou plusieurs autres (déterminées ou indéterminées) la conclusion d’un contrat à certaines conditions » . Ils sont ainsi conformes aux droits des obligations (Sous-paragraphe 1) et au formalisme imposé par le droit d’auteur français (Sous-paragraphe 2).

Droit des obligations

Le consentement ou l’information sur l’objet et la nature de l’engagement contractuel ne dépend pas obligatoirement d’une signature . Dans le cadre du contrat consensuel, l’accord réside simplement dans la rencontre des consentements des personnes. Dans le cas des Creative Commons, l’auteur propose un contrat d’adhésion, il n’est pas négociable. C’est ainsi que de nombreux contrats sont conclus sans être discutés, en fonction des conditions générales, sans réelles possibilités de modification des stipulations prévues . Les licences Creative Commons sont des contrats d’adhésion, dans la mesure où l’utilisateur n’a le choix qu’entre accepter ou refuser les conditions spécifiées . Le contrat d’adhésion est une « dénomination doctrinale générique qui englobe tous les contrats dans la formation desquels le consentement de l’une des parties consiste à se décider à saisir une proposition qui est à prendre ou à laisser sans discussion, adhérant ainsi aux conditions établies unilatéralement à l’avance par l’autre partie » .

Le texte des licences CC qualifie l’auteur d’ « offrant » et l’utilisateur d’ « acceptant ». Ce dernier est soumis à certaines obligations définies par le contrat, notamment celle d’inclure une copie de la licence à chaque exemplaire de l’œuvre qu’il partage, de faire figurer le nom de l’auteur et de garder intactes certaines dispositions du contrat, telles celles qui concernent l’exonération de responsabilité. Il n’est pas prévu de contrats de transfert de droits de propriété, il ne s’agit pas de contrats de cession ou de vente.

Le louage de chose incorporelle ou licence est défini à l’article 1709 du Code civil : « un contrat par lequel l’une des parties s’oblige à faire jouir l’autre d’une chose pendant un certain temps et moyennement un certain prix que celle-ci s’oblige de lui payer ». Le prix à payer ne s’entend pas, en l’espèce, comme une rémunération, mais plutôt comme une obligation de respect des conditions annoncées dans le contrat de Creative Commons. Bien que la licence, sous-catégorie de contrats, est traditionnellement réservée à la propriété industrielle et aux logiciels, ce terme est utilisé pour nommer les Creative Commons Licences, sous l’influence du terme américain et du concept de licence libre .

Il est nécessaire d’accompagner toute reproduction ou communication de l’œuvre d’une copie ou d’un lien vers le texte Creative Commons qui la gouverne. L’utilisation de l’œuvre vaut pour une acceptation tacite de l’objet du contrat de Creative Commons . Ainsi, le commencement de l’exécution du contrat proposé par le destinataire de l’offre révèle son acceptation : « Le mandat peut être donné par acte authentique ou par acte sous seing privé, même par lettre. Il peut aussi être donné verbalement, mais la preuve testimoniale n’en est reçue que conformément au titre « Des contrats ou des obligations conventionnelles en général ». L’acceptation du mandat peut n’être que tacite et résulter de l’exécution qui lui a été donnée par le mandataire » .

L’auteur garantit, dans l’article 5a de la licence de Creative Commons, qu’il a obtenu tous les droits nécessaires sur l’œuvre. Il s’engage à ne pas transmettre une œuvre constitutive de contrefaçon ou d’atteinte à tout autre droit de tiers.

Enfin, la licence de Creative Commons est impérativement accessible en français pour faciliter les relations entre les utilisateurs .

Validité des licences Creative Commons face au formalisme français des contrats de droit d’auteur

Le formalisme des contrats de cession de droits de propriété littéraire et artistique peut s’appliquer aux licences ou autorisations d’utilisation . Elles doivent décrire précisément le domaine d’exploitation, l’étendue, la destination, le lieu et la durée des droits concédés. La licence des Creative Commons énumère l’étendue des droits à l’article 3 : « la reproduction de l’œuvre seule ou incorporée dans une œuvre dite collective, comme une publication périodique, une anthologie ou une encyclopédie (…) et les œuvres dites dérivées : les traductions, les arrangements musicaux, les adaptations théâtrales, littéraires ou cinématographiques, les enregistrements sonores, les reproductions par un art ou un procédé quelconque, les résumés, la distribution d’exemplaires ou d’enregistrements » .

La motivation des traducteurs de la licence Creative Commons est de se conformer au droit français afin que leur utilisation n’entraîne aucun conflit et permette une circulation simplifiée des œuvres personnelles.

La protection de l’œuvre par la licence Creative Commons et sa durée d’exploitation répondent fidèlement au Code de la propriété intellectuelle. Les œuvres ainsi protégées se conforment aux articles L. 123-1 à 12, mais aussi aux exceptions prévues aux articles L. 132-19 et L. 211-4. L’étendue, au monde entier, est aussi identifiée et calquée sur le droit français.

La cession des droits de reproduction et de représentation à titre gratuit est permise . Toutefois, les sous-licences ne sont pas autorisées dans la documentation des Creative Commons. La titularité du droit d’usage ne confère nullement le droit de céder ces droits. Le bénéficiaire ne pourra donc distribuer ou communiquer l’œuvre au public que sous les mêmes conditions prévues par l’auteur original de l’œuvre. C’est ainsi que le choix sémantique a été minutieusement choisi autour du terme « bénéficiaire » plutôt que « licenciés ». La personne accepte l’offre, mais n’acquière aucun droit sur l’œuvre, ce qui marque encore plus l’interdiction de l’utilisation sans le consentement explicite et éclairé de l’auteur.

Par ailleurs, l’article 3 de la version originale de la licence Creative Commons prévoit que « les droits mentionnés ci-dessus peuvent être exercés sur tous les supports, médias, procédés techniques et formats, qu’ils soient connus aujourd’hui ou mis au point dans le futur ». A l’instar du Code de la propriété intellectuelle , cette licence prévoit les formats et supports, non prévisibles à l’heure actuelle, de diffusion de l’information.

La cession des droits peut être consentie à titre gratuit. Toutefois, en matière d’adaptations audiovisuelles , le Code de la propriété intellectuelle prévoit une rémunération. Cependant, les juges de la Cour d’appel de Paris ont admis la validité d’une cession des droits d’adaptation audiovisuelle, même si aucune rémunération n’est stipulée. Elle a considéré que la contrepartie financière venait des revenus générés par la publicité. L’intention de l’auteur d’obtenir une diffusion et une distribution plus large de son œuvre sous Creative Commons sera considérée comme la recherche d’une plus grande notoriété. C’est par les copies et les diffusions multiples, effectuées par les personnes bénéficiant de l’œuvre, que l’auteur pourra construire sa renommée. L’avantage est qu’il n’y a aucun contrat d’exclusivité avec un producteur et pas d’exploitation impérativement conforme aux règles spécifiques d’un contrat d’édition.

Par ailleurs, étant donné que les licences Creative Commons ne sont pas assimilables à des contrats d’édition, au sens de l’article L. 132-1 du Code de la propriété intellectuelle , elles ne prévoient pas d’obligation pour le bénéficiaire, correspondant à la charge pour l’éditeur d’assurer la publication et la diffusion d’exemplaire dont la fabrication est autorisée. Même l’option autorisant la modification de l’œuvre ne contraint pas à recourir à un contrat différent pour l’adaptation des droits audiovisuels, contrairement à ce qui est prévu dans le droit français qui fait une distinction entre l’adaptation audiovisuelle et les autres modes de publication.

Paragraphe 3 – Droit moral de l’auteur

Les droits moraux sont attachés à la personnalité de l’auteur et comprennent le droit de revendiquer la paternité de l’œuvre (Sous-paragraphe 1), le droit de choisir le moment et les modalités de sa publication (Sous-paragraphe 2), le droit de s’opposer à toute déformation ou mutilation de l’œuvre (Sous-paragraphe 3), le droit de s’opposer à toute utilisation pouvant porter atteinte à la réputation ou à l’honneur de l’auteur ainsi que le droit de retrait et de repentir (Sous-paragraphe 4). Dès lors, l’auteur peut retirer son œuvre de la circulation en échange d’une compensation des personnes engagées dans sa distribution. Il peut aussi la modifier sans que son exploitation ne soit irrémédiablement compromise. Contrairement aux droits patrimoniaux, les droits moraux sont inaliénables, perpétuels et imprescriptibles. Les licences Creative Commons ont du faire quelques adaptations afin de respecter ces droits sur le territoire français.

Paternité

L’option « paternité » de la licence Creative Commons est obligatoire. Un contrat imposant à l’auteur de renoncer à son droit de paternité , c’est-à-dire que son nom doit figurer sur l’œuvre protégée . L’auteur doit toujours se faire reconnaître comme auteur , même si l’auteur dit « nègre » s’engage à renoncer à être identifié comme auteur auprès du public. Dans ce cas, les licences Creative Commons n’imposent pas une renonciation définitive des droits, mais provisoire. L’auteur pourra, s’il le souhaite, revendiquer son droit à tout moment. Si l’anonymat est prévu, il ne permet cependant pas de donner de fausses attributions de paternité. L’utilisateur ne peut pas se faire passer pour l’auteur et indiquer son nom sur l’œuvre quand bien même il aurait modifié celle-ci. Dans ce cas, on admet une présomption de paternité, de titularité des droits au bénéfice de celui sous le nom duquel est divulguée l’œuvre. La bonne foi des utilisateurs reste un élément central de la désignation de la paternité des œuvres.

Pour des raisons d’ordre public, cette option est commune à toutes les licences car l’auteur doit toujours être en mesure de revendiquer la paternité d’une œuvre. L’article 4.a de la licence stipule « si l’acceptant crée une œuvre dite collective, à la demande de tout offrant, il devra, dans la mesure du possible, retirer de l’œuvre dite collective toute référence au dit offrant, comme demandé ». Toutefois, la renonciation ne peut être que temporaire, étant donné qu’un contrat qui préciserait une renonciation définitive serait nul.

Respect de l’œuvre

Autoriser à l’avance les modifications n’équivaut pas à aliéner le droit au respect de l’œuvre et à son intégrité. A tout moment, l’auteur peut revenir sur l’offre de Creative Commons qu’il a choisi. S’il juge une adaptation de son œuvre nuisible à l’intégrité de celle-ci, il peut procéder à un recours fondé sur le droit au respect de son œuvre. Cela se fait souvent à l’amiable entre les parties, en cas d’utilisation ou de dénaturation de l’œuvre. L’adaptation doit respecter l’esprit de l’œuvre et son style , tout en conservant une grande liberté d’agir pour l’auteur créant une œuvre composite « pour prouver (…) une expression nouvelle à la substance de l’œuvre » .

Droit de retrait

D’ordre public, le droit de retrait peut être exercé même si le parcours de l’œuvre rend son application difficile. La multiplication des canaux de distribution, de divulgation d’une œuvre n’est pas un frein à ce droit. Les conditions d’utilisation de l’œuvre peuvent être modifiées tout autant que l’arrêt de la diffusion demandé. Dès lors, l’auteur met fin au contrat Creative Commons, les utilisateurs devront respecter sa volonté tout en jouissant de leur bonne foi requise dans l’exécution d’une obligation, c’est-à-dire que l’auteur doit indemniser au préalable le cessionnaire du préjudice causé. Dans le cadre des Creative Commons, le droit de repentir est assez théorique. Les bénéficiaires d’une œuvre sous licence n’auront, la plupart du temps, pas connaissance du souhait de l’auteur de retirer son œuvre et continueront à la diffuser. La communication via Internet peut rendre l’effectivité de sa décision problématique, mais l’article 7.b de la licence CC prévoit que « l’offrant se réserve à tout moment le droit d’exploiter l’œuvre sous des conditions contractuelles différentes ou d’en cesser la diffusion ». Sur cette autoroute de l’information, le droit de retrait se retrouve presque réduit à néant.

Droit de divulgation

Le titulaire des droits dispose du droit de première divulgation de son œuvre dans les conditions de son choix. Dans le cadre d’une œuvre dérivée , le nouvel auteur conserve ses prérogatives, même s’il utilise une œuvre originale d’un autre auteur, conformément aux dispositions du Code la propriété intellectuelle : « L’œuvre composite est la propriété de l’auteur qui l’a réalisée, sous réserve des droits de l’auteur de l’œuvre préexistante » . L’auteur de la nouvelle œuvre doit donc se conformer aux droits d’auteur de l’œuvre initiale, il évoque ainsi se paternité. Cependant, il est le seul à jouir des droits de divulgation de la nouvelle œuvre, il en choisit la date et le média de diffusion. S’il souhaite mettre à disposition du public l’œuvre dérivée sous un autre type de contrat Creative Commons, il doit obtenir l’autorisation écrite du titulaire des droits, sous peine de devoir se conformer aux mêmes conditions que celles choisies par l’auteur de l’œuvre initiale.

L’option Share Alike (partage des conditions initiales à l’identique) semble incompatible avec le principe d’épuisement des droits de distribution. Celui-ci est précisé par l’article 6.2 du traité OMPI du 20 décembre 1996 : « Aucune disposition du présent traité ne porte atteinte à la faculté qu’ont les parties contractantes de déterminer les conditions éventuelles dans lesquelles l’épuisement du droit prévu à l’alinéa 1) s’applique après la première vente ou autre opération de transfert de propriété de l’original ou d’un exemplaire de l’œuvre, effectuée avec l’autorisation de l’auteur ».

Le droit de la première distribution, vente ou mise à la disposition du public, s’épuise dès lors qu’il est réalisé. Toutefois, il ne concerne pas les services en ligne et les copies licites, comme le prévoit le considérant 29 de la directive 2001/29/CE : « La question de l’épuisement du droit ne se pose pas dans le cas des services, en particulier lorsqu’il s’agit de services en ligne (…), tout service en ligne constitue en fait un acte devant être soumis à autorisation dès lors que le droit d’auteur ou le droit voisin en dispose ainsi » et son article 4.2 « Le droit de distribution dans la Communauté relatif à l’original ou à des copies d’une œuvre n’est épuisé qu’en cas de première vente ou premier autre transfert de propriété dans la Communauté de cet objet par le titulaire du droit ou avec son consentement ».

L’article 2 des contrats Creative Commons, quant à lui, stipule que les droits patrimoniaux s’appliquent sans préjudice du droit applicable. D’une nature économique et d’objet régulateur, l’épuisement des droits dans l’espace communautaire vise essentiellement à éviter l’abus de l’ayant-droit d’un monopole pouvant affecter la concurrence. La restriction d’utilisation imposée par l’auteur lors de la première distribution de son œuvre s’apparente à cette idée d’épuisement des droits. Etant donné que l’œuvre n’a pas de valeur commerciale, l’épuisement total des droits n’a pas grand intérêt sur une œuvre de l’esprit. La restriction, au sens de Share Alike, impose de transmettre le document dans les mêmes conditions que celles décidées par l’auteur. Cela correspond à l’exercice des droits patrimoniaux sur le long terme, de manière inaliénable, ce qui va au-delà des prérogatives imposées par le Code de la propriété intellectuelle. Toutefois, l’auteur voulant utiliser et modifier l’œuvre peut demander le consentement de la personne et s’accorder avec lui sur l’utilisation nouvelle de l’œuvre.

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